Suite à l’enquête menée par le Journal Oubangui Médias, il est établi que de nombreux actes de contrebande de carburant sont perpétrés sur le territoire national de la Centrafrique.

Face à la porosité des frontières nationales, notamment du Nord-Est en passant par le Sud-Ouest, on aperçoit des camions qui empruntent les voies terrestres, des pirogues et des barques, via la voie fluviale, remplis des fûts contenant de carburant ayant pour objectif de ravitailler la Capitale (Bangui) et les villes provinciales. Cette pratique apparaît légale aux yeux du citoyen lambda et n’a pas fait l’objet d’une dénonciation. Ce qui facilite des entrées frauduleuses de carburant par les contrebandiers sans qu’ils soient dénoncés auprès du Comité de la Lutte contre la Corruption établi par la Primature et qui dispose d’un numéro vert 1316.

Les sources de ravitaillement en carburant proviendraient du Nigéria en transitant par le Cameroun ; de Congo-Brazzaville par Betou et de la République Démocratique du Congo (RDC) qui partage la plus longue frontière riveraine avec la Centrafrique via Yakoma, Kota-Koli, Gbadolite et Zongo.

En provenance du Cameroun, ces produits pétroliers sont desservis dans les différentes villes Sud-Ouest de Sangha-Mbaéré, de la Mambéré-Kadéï pour atteindre la Capitale Bangui et sont pour la plupart stockés dans le secteur de Km5. S’agissant de ceux qui proviennent de Pointe-Noire, c’est par la Lobaye et ils sont ensuite dépotés à Petevo, quartier situé dans le 6ième Arrondissement. En revanche, pour la RDCongo, ces produits pétroliers sont acheminés dans les préfectures de Mbomou, de la Basse-Kotto et vers Bangui.

Selon nos sources, les trafiquants transportent les produits dans des fûts à l’intérieur des barques et gros camions spécialement aménagés à l’intérieur desquels ils rangent une centaine ou plus de centaines de fûts industriels en caoutchouc ou en fer de 200 litres chacun, remplis de carburant en les superposant souvent par deux ou trois.

Cette pratique n’est pas conforme aux normes légales de transport d’hydrocarbures car les contrebandiers font le transport, soit à l’aide de citernes qui n’ont aucun document administratif délivré par la nouvelle coordination pour le chargement de carburant, soit par des taxis-motos à destination des villes de Berberati, Boda, Mbaïki, Bouar, Bossemptelé, Boali, et Bangui. Pour les frontières riveraines, le transport fluvial se fait par le biais des pirogues et des barques. Du point de vue organisationnel, les contrebandiers, impliqués dans ce trafic, donnent des commissions selon les itinéraires empruntés et ils opèrent la nuit tout en payant des pots-de-vin aux fonctionnaires et aux forces de l’ordre qu’ils rencontrent sur leurs chemins. Ce faisant, cela permet d’éviter leur arrestation ou la confiscation de leurs produits.

Sur les panneaux publicitaires figés dans la ville de Bangui et à travers les messageries des sociétés de téléphonies, il est écrit « Gouverner c’est dire non à la corruption, non à la fraude, non à la mauvaise manière de servir. Appelez gratuitement le 1316 pour toutes dénonciations ».

Cette lutte doit être imparable, conduire à des enquêtes ouvertes contre les présumés responsables de cette contrebande aggravée, le blanchiment des capitaux (art. 198 à 203 du Code Pénal Centrafricain), la corruption (art. 368 à 370 du Code Pénal Centrafricain) et la concussion (art. 371 à 374 du Code Pénal Centrafricain), car ces derniers détiennent des dépôts illicites des produits d’hydrocarbures dans les localités de Bangui, et à l’intérieur du pays.

Les informations en notre possession attestent l’existence des faits réels aussi graves qui laissent une traçabilité de cette gamme d’infractions à la loi pénale révélées ci-dessus.

Le Comité de Lutte contre la Corruption, conformément aux dispositions des articles 198 à 203 du Code pénal centrafricain réprimant le Blanchiment des capitaux ; 368 à 370 prévoyant et sanctionnant la Corruption ; 371 à 374 proscrivant la Concussion, informe tous les Parquets des procureurs de la République en général et le Parquet du procureur de la République de Bangui en particulier des faits ci-dessus mentionnés.

Augmentation de contrebande, faible fréquentation des stations-services

Il convient de souligner que les stations-services sont quasiment vides, pénalisées de vente de carburant à cause des principaux présumés auteurs des faits de contrebande identifiés dans les régions où ils sont opérationnels.

Au vu de ces éléments, l’heure est grave d’où la nécessité pour le Ministère d’Etat Chargé de la Justice, des Droits Humains et de la Bonne Gouvernance en synergie d’actions avec les Ministères de la Sécurité Publique, de l’Administration territoriale, des Budgets et finances et du Comité de la Lutte contre la Corruption de lancer une vaste opération d’interpellation de toutes les personnes impliquées dans les faits infractionnels en cause, de procéder aux saisies des moyens servant à la commission de ces actes et à la mise sous-scellés des différents dépôts d’hydrocarbures de contrebande. Ce qui permet d’éradiquer ce fléau et de mettre un terme à cette pratique de contrebande qui, non seulement paralyse l’économie nationale, mais aussi devient de sources de financement des groupes armés.

A qui profite l’économie de la contrebande de carburant ?

Une simple déclaration du ministère de l’énergie, d’interdire le transport de carburant dans les fûts n’a pu stopper la progression sur le terrain. Alors avec la tension de la trésorerie qui prévaut actuellement dans le pays où l’État centrafricain a besoin de l’argent qui peut être collecté par les taxes auprès des entreprises de vente des produits pétroliers entre autres, Total, Tradex et Sarpd-oil ça sera difficile puisque l’État a misé sur une économie de deux milliards cinq cents millions de francs CFA (2.500.000.000 FCFA) par mois. Cependant, ces entreprises ne s’en sortent pas. On imagine une perte catastrophique avec effet escompté de la concurrence déloyale, les prix à la pompe de gasoil 1450 FCFA, essence 1350 FCFA mais sur le marché noir 1l d’essence est à 1100 FCFA.

Selon des sources contactées au milieu des marqueteurs, après la suppression de l’Agence de stabilisation de régulation et du prix des produits pétroliers (ASRP), une coordination a été mise en place avec un poignet de 53 personnes recrutées. Mais, elles ne peuvent faire le travail convenablement, car elles ne sont pas aussi bien formées. L’absence de l’ASRP, laisse un grand vide dans la lutte contre les fraudes pétrolières en République Centrafricaine étant gardienne du secteur d’hydrocarbure, cela fait croître les activités de transport illicite de produits pétroliers à Bangui et dans les villes de provinces.

Lors de sa prestation de serment de son second quinquennat, le Chef de l’État, Professeur Faustin-Archange Touadera, a solennellement déclaré de tout mettre en œuvre pour bannir la corruption. Malheureusement, aucune condamnation plus de deux ans passés. Cette contradiction est tellement visible et perçue par le Peuple, ce qui démontre que l’impunité ZERO est loin de devenir une réalité. Plusieurs noms dont certains Cadres de son régime sont cités dans les affaires de pot-de-vin mais ils ne sont pas jusqu’aujourd’hui inquiétés par la Justice. Et la contrebande des produits pétroliers, des proches du président de la République dont certains ministres ne seraient pas loin dans cette affaire.

Zarambaud Mamadou