Le 13 Août 1960, jour de « l’indépendance », la République Centrafricaine, tout comme treize (13) autres pays francophones, a signé une série de onze (11) accords avec la France, qui se résument comme suit :

Accord n 1 sur la dette coloniale pour remboursement des bénéfices de la colonisation :

L’État centrafricain nouvellement indépendant devait rembourser le coût des infrastructures construites par la France pendant la colonisation, sans précision aucune sur le détail des coûts, des bénéfices, des conditions de paiements imposés ;

Accord n 2 portant confiscation automatique des réserves financières nationales :

Notre pays devait déposer ses réserves financières auprès de la Banque de France, à compter de l’exercice 1961, voyant ainsi la gouvernance de la politique monétaire lui échapper irrémédiablement, du fait d’être captée et pilotée directement par le gouvernement français, bien par-delà les compétences reconnues aux autorités financières officielles locales, à savoir la CEMAC et la CEDEAO, toutes deux (2) zones économiques et financières obligées de garder Soixante-Cinq pourcents (65 %) de leurs réserves de change dans un compte d’opérations au Trésor français, de même que Vingt pourcents (20 %) supplémentaires afin de couvrir « les risques financiers ».

Les deux (2) banques centrales de ces zones, à savoir la BEAC et la BCEAO, ont certes la possibilité de procéder à des retraits supérieurs, mais uniquement sur accord du Trésor français, sachant que celui-ci procède lui-même à l’investissement des réserves gardées sur la place boursière parisienne…

Ce sont donc finalement Quatre-Vingts pourcents (80 %) des réserves financières africaines qui sont déposées sur un compte opération contrôlée par l’administration française, pour ainsi dire que les deux (2) banques centrales de la zone CFA ne sont africaines que de nom, n’ayant aucune emprise sur la politique monétaire appliquée. Bien pire donc pour les pays de la zone pris individuellement, qui ignorent totalement quelles parts de réserves financières leur appartiennent en groupe ou individuellement au sein du Trésor français.

Accord n 3 sur le droit de premier refus sur toute ressource brute ou naturelle découverte dans le pays :

La France a le premier droit d’achat des ressources naturelles de la terre de son ancienne colonie, prioritairement à tous autres partenaires du pays ;

Accord n 4 portant priorité aux intérêts et aux entreprises françaises dans les marchés publics et appels d’offres publics :

Dans l’attribution des marchés publics, les entreprises françaises ont la priorité sur l’attribution, même si le pays peut obtenir un meilleur rapport qualité-prix ailleurs. Du coup, la quasi-totalité des leviers économiques du pays se sont concentrés entre les mains des expatriés français ou alors de suppôts français locaux ;

Accord n 5 portant droit exclusif de fournir des équipements militaires et de former les officiers militaires des colonies :

Grâce à un système sophistiqué de bourses, de subventions, galvanisé par « les accords de défense » dits « pacte colonial », la RCA devait envoyer les officiers supérieurs de son armée nationale en formation en France qui à cet effet pouvaient librement les conditionner et embrigader aux fins des opérations de déstabilisation politique (Bokassa 1er en 1966, Barracuda en 1979, CMRN en 1981, Mutineries à compter de 1996, Libérateurs en 2003,Seleka en 2013), notamment à l’encontre de Chefs d’État peu obséquieux.

Accord n 6 sur le droit pour la France de déployer des troupes et d’intervenir militairement dans le pays pour défendre ses intérêts :

En vertu de ce qu’on appelle « les accords de défense » attachés au pacte colonial, la France a le droit d’intervenir militairement en Centrafrique, d’y stationner des troupes françaises en permanence, notamment dans des bases et installations militaires entièrement gérées par des représentants français, tel que celle de Bangui-Mpoko en pleine Capitale centrafricaine ;

Accord n 7 sur l’obligation de faire du français la langue officielle du pays et la langue pour l’éducation :

La mission de diffusion de la langue et de la culture françaises fut confiée à une organisation spécifique, « la Francophonie ». Dotée de plusieurs sous-organisations satellitaires, le réseau est ordonnancé au Ministère français des Affaires étrangères qui en tire les ficelles ;

Accord n 8 sur l’obligation d’utiliser le franc CFA (franc des colonies françaises d’Afrique) :

Quoiqu’arrimé à l’Euro, le Franc CFA que la RCA et toutes les autres anciennes colonies françaises sont contraintes d’utiliser exclusivement n’a point cours au sein l’Union européenne;

Accord n 9 sur  l’obligation d’envoyer en France un bilan annuel et un rapport d’état des réserves sous peine de ne pas recevoir d’argent :

Les directeurs des deux (2) banques centrales des anciennes colonies ont la responsabilité de présenter lesdits rapports, lors notamment des réunions bisannuelles des Ministres des Finances sur les anciennes colonies, tous rapports que la Banque de France et le Trésor public français se chargent de compiler ;

Accord n 10 portant renonciation à toute alliance militaire avec d’autres pays, sauf autorisation de la France :

Pendant des décennies la RCA n’a eu comme partenaire militaire exclusif rien que la France, du fait de l’Accord signé qui lui interdisait toute autre alliance militaire ;

Accord n 11 sur l’obligation de s’allier avec la France en cas de guerre ou de crise mondiale :

En vertu de cet accord, plus d’un (1) million de soldats africains dont des milliers de ressortissants de l’Oubangui-Chari (ex République Centrafricaine) eurent à se rendre au front pour combattre l’ennemi nazi et fasciste au cours de la Seconde Guerre mondiale, au point d’y risquer leurs intégrités physiques sinon leurs vies.

Les 11 accords expirés

C’est donc en considération de ces Onze (11) Accords assassins précités qu’on a toujours présumé que la RCA et les autres pays francophones d’Afrique n’ont jamais été indépendants, au point d’attirer la sympathie pour ne pas dire la compassion de la part de tierces puissances mondiales notamment orientales, aux aguets des échéances prévus aux textes controversés, à savoir Soixante (60) ans RENOUVELABLES…

Concernant la République Centrafricaine plus particulièrement, une coïncidence extraordinaire des calendriers et événements de la diplomatie internationale a fini par permettre l’entrée en scène de la Russie sur l’échiquier centrafricain, qui depuis  lors a commencé à prêter main-forte au Régime de Bangui dans son rapport de force à l’encontre du pays ancien colonisateur et néocolonialiste.

C’est dans ce contexte nouveau qu’à l’arrivée effective du terme fixé aux Accords 1960, le pays est parvenu pour une première fois à résister aux assauts de la France, par factions rebelles interposées dont particulièrement la CPC, pour ne citer que la dernière en date qui a été utilisée comme velléité ultime de reconduire les Accords moyenâgeux et sataniques de 1960 : Convenus en effet pour le délai de Soixante (60) ans à compter de la dernière ratification par le Parlement du deuxième pays signataire, lesdits Accords devaient être renouvelés au plus tard la dernière année de validité soit entre le cinquante-neuvième (59è) anniversaire et le soixantième (60è). Le Parlement centrafricain ayant ratifié les textes le 27 Décembre 1960, ce délai fatidique a donc couru du 27 Décembre 2019 au 27 Décembre 2020, date des dernières élections législatives et surtout PRÉSIDENTIELLE, d’où les frasques et exactions de la part de la CPC tels que nous en avons sombres souvenir…

Si ce ne fut l’apport de la part des nouveaux alliés militaires qui sont la Russie et le Rwanda, que serait devenue la République toute entière ?

SECOUÉE, MEURTRIE, LA NATION A PLOYÉ MAIS N’A PAS CÉDÉ, pour finir d’accéder à l’ère tant désirée de liberté et de justice, le terme INDÉPENDANCE demeurant controversé, ambigu.

Qu’on ne s’y méprenne donc pas : Depuis le 27 Décembre 2020, les Accords du 13 Août 1960 sont bel et bien mais définitivement EXPIRÉS. C’est pourquoi le Président Emmanuel Macron s’exerce depuis lors à tirer les conséquences, en procédant à l’arrêt de l’aide budgétaire, puis bientôt à celui de l’assistance militaire par  fermeture de la base de Mpoko en Décembre prochain. Ayant de même perdu les privilèges commerciaux, les opérateurs économiques français vont commencer à plier bagages, à commencer par la Société Total Énergies qui préconise céder incessamment ces actifs sur l’ensemble du territoire.

Et tout cela cependant que le Régime politique en place peut impunément se permettre de signer tous accords de défense avec différents partenaires (Russie, du Rwanda), et même de créer une monnaie nationale (SANGO COIN), par volonté affichée de contacter avec tous investisseurs intéressés de par le monde entier.

Le processus d’autonomisation entamée est certes contrecarré par le réseau franco-occidental néocolonialiste, de l’extérieur (échec apparent de la cryptomonnaie Sango Coin) comme de l’intérieur (montée au créneau de l’Opposition démocratique et d’une partie conquise de la Société civile pour faire barrage aux velléités de la part de Touadera de se maintenir au pouvoir après la fin de son deuxième mandat). Mais ce n’est que normal, l’accouchement à la liberté véritable devant se faire au forceps.

Patriotiquement.

Maître Timoléon KOKONGO

Avocat au Barreau de la RCA/SG ADP