Depuis sa création par le Conseil de sécurité des Nations unies et son déploiement en République centrafricaine en 2014 et à l’image de toutes les opérations de paix des Nations unies, la MINUSCA a toujours été dotée d’un mandat de promotion et de protection des droits de l’Homme. La résolution 2552, adoptée le 12 novembre 2020, confirme ce mandat au paragraphe 32 alinéa d), avec les tâches suivantes :

i)                    Suivre la situation en ce qui concerne les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’Homme commises sur l’ensemble du territoire de la République centrafricaine et les atteintes à ces droits, en informer en temps voulu le Conseil de sécurité et le public et concourir aux enquêtes y relatives ;

ii)                   Suivre la situation en ce qui concerne les violations et exactions commises contre des enfants et des femmes, notamment les viols et autres formes de violence sexuelle perpétrés en temps de conflit armé, veiller à les signaler et concourir aux enquêtes y relatives, en collaboration avec l’Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants ;

iii)                 Aider les autorités de la République centrafricaine à protéger et promouvoir les droits de l’Homme et à prévenir les violations et les atteintes, et à renforcer les capacités des organisations de la société civile;

Ce mandat est exécuté par la Division des Droits de l’homme (DDH) et d’autres composantes de la MINUSCA sous la supervision du Bureau du Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme, de manière quotidienne et impartiale avec une méthodologie rigoureusement approuvée, sur l’ensemble du territoire centrafricain et les résultats rendus publics, dans le cadre d’un processus de dialogue permanent avec les autorités centrafricaines. A cet égard, plusieurs rapports relatifs aux violations commises dans le pays ont été publiés dont le plus emblématique reste le rapport mapping sur les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises sur le territoire de la République centrafricaine de janvier 2003 à décembre 2015, document largement diffusé en concertation avec les autorités gouvernementales dans le cadre de la lutte contre l’impunité.     

Concernant l’appui de la MINUSCA au secteur, la Division des Droits de l’Homme contribue au renforcement des capacités des partenaires nationaux dans le domaine des droits de l’homme et de la justice transitionnelle, avec, au niveau programmatique, un appui technique et financier aux entités gouvernementales, pour les activités de promotion des droits de l’homme au travers d’ateliers de formations, de tables rondes, d’assistance technique dans le cadre du vetting et de la justice transitionnelle, et des activités de sensibilisation grand public en partenariat avec l’Etat et la société civile.

Parmi ces interventions, il importe de signaler l’appui au Haut Conseil de la Communication sur la prévention de l’incitation à la haine, à la violence et à la gestion des rumeurs en période électorale ainsi que le soutien à la mise en place de la Commission Vérité, Justice, Réparation et Réconciliation (CVJRR) et de la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales (CNDHLF). 

Dans le cadre des élections, notamment en vue du respect du calendrier et de la transparence du processus électoral, la MINUSCA a également appuyé le Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme (MJDH), le Comité National pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide, des Crimes de Guerre, des Crimes contre l’Humanité ainsi que de toutes Formes de Discriminations (CNPG), la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales (CNDHLF), la Haute Autorité chargée de Bonne Gouvernance (HABG),  le Réseau des ONG de Promotion et de Défense des Droits de l’Homme (RONGDH), le Réseau des Journalistes pour les Droits de l’Homme (RJDH), le Réseau des journalistes sensibles au conflit et aux messages de haine (RJSMH) et de  Women Act For Living Together (WALT).

En outre, depuis son installation en 2014, la MINUSCA concourt aux côtés du gouvernement à la lutte contre l’impunité, soit en appuyant les forces de sécurité intérieure dans leurs enquêtes et en vue de l’arrestation des auteurs de violations des droits de l’homme y compris les membres des groupes armés, soit en procédant directement à ces arrestations en utilisant les Mesures temporaires d’urgence. Plusieurs auteurs de violations des droits de l’Homme y compris des membres de groupes armés jugés ou en attente de jugement ont été arrêtés et remis aux autorités nationales par la MINUSCA. De même, la Mission dans ses rapports périodiques, indique les personnes à qui les allégations de violations des droits de l’homme pourraient être imputées.

La MINUSCA a continué d’apporter son soutien à l’opérationnalisation de la Cour Pénale Spéciale (CPS). Cette dernière vient d’accueillir un nouveau juge international pour venir siéger à la Chambre d’Assises, aux côtés de deux magistrats centrafricains, déjà nommés. Une première section de la Chambre d’Assises est donc désormais pleinement constituée. Sur le plan de la justice transitionnelle en général, une mission vient d’arriver à Bangui dans le cadre d’une étude, effectuée en coopération avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD),   qui vise à proposer des options pour un programme de réparations adapté au contexte de la RCA et de fournir des options de fonctionnement et de financement d’un fonds spécial de réparation des victimes, tel que prévu dans l’Accord politique pour la paix et la réconciliation (APPR). L’étude appuiera le travail de la CVJRR, dont l’une des missions est de formuler des recommandations aux autorités nationales sur les possibles modalités de réparations (légales, institutionnelles, financières, humanitaires, de protection, programmatiques, ou autres) et sur la mise en place d’un fonds spécial pour les victimes.

Sur les investigations

Le monitoring constitue un autre volet du travail de la DDH de la MINUSCA. Les enquêtes de la Mission sur les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire reposent sur une politique et une méthodologie développées par le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme qui offrent des orientations et pratiques dans la surveillance des violations et dans la conduite des commissions d’enquête et missions d’établissement des faits sur le droit international des droits de l’homme et le droit humanitaire international. Elles sont menées de manière objective et impartiale, sans aucun parti pris ni agenda particulier : le seul but est de documenter les violences et déterminer les responsabilités ainsi que la chaîne de commandement afin que les auteurs puissent répondre de leurs crimes devant la justice et de promouvoir l’adoption de garanties de non-répétition des violations. Il s’agit également de lutter de manière active contre l’impunité en mettant fin, entre autres, à des abus et l’usage excessive de la force.

La semaine dernière, en réponse à une demande spécifique de la part des autorités nationales centrafricaines, la MINUSCA a transmis à ces dernières les informations relatives à des allégations de violations imputables aux Forces armées centrafricaines (FACA) et leurs alliés. Ces informations partielles sont contenues dans un rapport de la MINUSCA en cours de finalisation sur les violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire commises entre le 1er décembre 2020 et le 30 avril 2021. Ce rapport, qui n’a pas encore été rendu public, répertorie les violations et leurs auteurs, en large partie les groupes armés et la CPC, ainsi que les forces de défense et de sécurité, et leurs alliés. Concernant la CPC, une série de communiqués de la MINUSCA et des partenaires internationaux ont condamné fermement l’entreprise commune criminelle de cette coalition. La MINUSCA a également documenté toutes les violations graves de la CPC et travaille avec le gouvernement dans le cadre de la lutte contre l’impunité afin que les auteurs répondent de leurs actes 

De même, les Représentantes spéciales adjointes du Secrétaire général Lizbeth Cullity et Denise Brown, ont été reçues le 3 mai, à sa demande, par le Premier ministre centrafricain, Firmin Ngrebada. Durant son interaction avec les autorités, la MINUSCA a rappelé son mandat de protection des droits de l’hommes conformément à la résolution 2552, ainsi que la procédure régissant les rapports publics, dont la publication inclue les observations et commentaires du gouvernement.

La MINUSCA s’étonne des réactions suscitées par ce partage d’informations avec les autorités nationales ainsi que des accusations graves portées contre elle. La Mission précise que ses investigations ne répondent à aucune démarche particulière et sont menées conformément à son mandat.  La MINUSCA précise qu’elle est dans une dynamique de partenariat avec le gouvernement et poursuit son travail en toute impartialité et sans aucune pression.

De même, la MINUSCA considère comme inexactes, infondées, fallacieuses et dangereuses, les accusations de partialité et de connivence avec la coalition des groupes armés sous la coordination de François Bozizé. Ces accusations relèvent d’une campagne de désinformation regrettable au regard des progrès enregistrés dans la mise en œuvre de son mandat en coopération étroite avec le gouvernement, le peuple centrafricain et les partenaires internationaux dans l’intérêt de la paix. A cet égard, la MINUSCA rappelle le rôle crucial de sa Force et sa Police pour endiguer les attaques des groupes armés, entre autres, à Bangui, Bossangoa, Bossembélé et Bangassou…au prix de la mort de 7 soldats de la Paix. Elle réaffirme son engagement à exécuter son mandat aux fins de réduire la présence et la menace des groupes armés et de continuer à s’investir pleinement avec le Gouvernement dans les efforts en cours pour la restauration effective de l’autorité de l’Etat, en s’inscrivant dans le cadre de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en RCA tout en maintenant sa posture proactive et robuste dans la protection des populations civiles.

Tout en reconnaissant le droit à la manifestation, la MINUSCA alerte sur les conséquences que pourraient avoir la stigmatisation de la Mission et les discours hostiles contre son personnel. Cette préoccupation a été portée à la connaissance des autorités nationale qui ont promis d’y apporter une réponse. La Mission rappelle que les instigateurs et acteurs de toute stigmatisation et incitation publique à la violence à son égard s’exposent aux sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies et aux procédures judiciaires. La Mission continuera de documenter de tels agissements pour en identifier les auteurs et instigateurs à toute fin utile.   

Par ailleurs, la MINUSCA salue l’annonce par le gouvernement, de l’ouverture d’une enquête administrative et judiciaire sur les allégations portées à son attention qui a été suivie par la mise en mise en place d’une Commission d’enquête spéciale. La Mission réitère son engagement et sa disponibilité à continuer de travailler avec les autorités dans la promotion et la protection des droits de l’homme en RCA.

Minusca