La région de Haut Mbomou située à l’Est du pays fait face à une insécurité grandissante, aux violences armées depuis plusieurs mois. Mais, ces violences se déroulent dans une indifférence totale, un silence qui ne dit pas son nom.

Il ne se passe pas un seul jour sans qu’il ait violence armée, braquage et autres violations graves des droits de l’Homme. De Mboki en passant par Zemio, Bambouti , Rafai et Obo, les groupes armés de l’UPC de Ali Darass s’affrontent régulièrement soit avec l’armée nationale, soit avec la milice locale Azande Ani Kpi Gbe, une milice qui s’est constituée pour résister aux attaques armées dans la région, lointaine et semble être oubliée.

Cette milice a vu le jour le 3 mars 2023, en diffusant un communiqué dans lequel ils dénoncent les exactions dont font face les habitants de la région, notamment l’ethnie Zandé. La milice Azande Ani Kpi Gbe veut dire littéralement « les Zandés sont beaucoup morts ».

Des militaires sud-soudanais se sont affrontés avec les miliciens Azande Ani Kpi Gbe ces derniers temps, sans des réactions vives de la part des autorités

Ces miliciens affirment protéger les communautés locales meurtries par des exactions des rebelles de l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA) de Joseph Kony depuis 2008 ainsi que celles des rebelles de l’UPC depuis 7 ans.

Haut Mbomou, zone contrôlée par l’UPC depuis 7 ans

En plus de ces rebelles de la LRA qui aujourd’hui se sont dispersés dans la forêt, les rebelles de l’UPC, chassés dans la zone de Bambari ont renforcé progressivement leur présence dans le Haut Mbomou et commettent chaque jours des violations graves des droits de l’Homme dans l’indifférence totale.

La seule ville où il y a la présence des FACA c’est Obo. Mais l’insécurité dépasse même les capacités d’intervention des FACA qui ne disposent pas assez de moyen logistique pour faire face aux rebelles lourdement armés.

Dans cette préfecture, les forces onusiennes sont régulièrement prises pour cible par les rebelles de l’UPC ou les milices et autres groupes armés qui opèrent dans la région.

Mboki, carrefour de trafics d’armes

Mboki est depuis plusieurs années la porte des mercenaires, des guerriers, des bandits et le couloir des trafics d’armes venant du Tchad, du Soudan, du Sud Soudan, du nord RDC et de l’Ouganda. Plusieurs sources militaires parlent d’une véritable poudrière à ciel ouvert, un danger pour la population et les forces régulières dans la région.

Cette région est devenue depuis les crises de 2013 une porte d’entrée des rebelles venant du Sahel en passant par le Soudan, le Sud Soudan ou le Tchad. Des sources militaires ont confié à l’Oubangui Médias que cette zone, peu peuplé et vaste pourrait devenir la caverne des rebelles et bandits de tout genre qui fuient les combats dans les pays limitrophes, à la recherche des pierres précieuses, des ivoires, du café et autres produits de braconnage.

Ce qui est sûr, l’armée n’a pas de contrôle sur cette ville.

Un drame humanitaire

Pas plus tard que dans la nuit du 17 mai, la base de l’ONG internationale Coopi à Obo a été braquée aux environs de 22 heures, non loin du centre administratif proche de l’aérodrome. Des hommes armés ont fait irruption pour emporter des biens et une somme d’argent sans oublier les outils de travail comme les téléphones et ordinateurs.

Selon les dernières informations de l’Oubangui Médias, plus de 1500 personnes, à majorité des peuls quittant Mboki pour fuir les exactions ont été bloquées par des éléments de l’UPC à 40 Km de Zemio, notamment au village Kitessa. Ces rebelles estiment qu’il s’agit de « trahison » si ces personnes fuient pour se réfugier dans d’autres localités.

Alors que l’accès humanitaire est difficile dans la région, la présence des rebelles est encore une cause de précarité de la population civile. La présence des acteurs humanitaires est réduite dans la zone alors que les besoins sont énormes.

La ville de Bambouti à l’extrême Est du pays, où plusieurs milliers de réfugiés soudanais sont pris en charge est contrôlée par les rebelles de l’UPC. Ce qui rend encore complexe le déploiement de l’aide humanitaire dans la région.

Mais que faire face à ces occupations rebelles ?

Des opérations conjointes seront nécessaires pour détruire les capacités de nuisance de ces rebelles et les mettre hors état de nuire. Aujourd’hui, la région du Haut Mbomou est devenue une zone de concentration des rebelles qui fuient les offensives de l’armée régulière avec l’appui des alliées russes et rwandais.

Le gouvernement doit renforcer la présence militaire dans la préfecture; doter l’armée des moyens logistiques conséquents afin de neutraliser tous les groupes nuisibles dans la zone.

Le vide laissé par l’armée nationale a fait prospérer une milice locale qui n’est pas exclue des exactions sur la population civile et les attaques contre les positions des forces armées centrafricains ainsi que celles des forces onusiennes.

Fridolin Ngoulou