La délivrance de certains documents administratifs d’état civil notamment les actes de naissance est-t-elle une activité exclusive de la Mairie de Bangui ? Cette responsabilité ne relève-t-elle pas aussi des autres municipalités? La réponse à ces questions dans ce dossier signé Oubangui Médias.

L’acte de naissance est le premier document administratif  de l’état civil que doit obligatoirement avoir un enfant dès sa naissance, qu’il soit né à l’hôpital ou à la maison. Le processus de son obtention passe d’abord par la délivrance d’un bulletin de naissance de la maternité où l’enfant est né. En cas de naissance à domicile (au village ou au quartier), c’est une attestation de naissance délivrée par le chef de village ou quartier. Dans l’un ou l’autre cas, le document de la formation médicale ou celui du chef du village ou du quartier déclarant la naissance, doit être acheminé à la mairie qui doit à son tour enregistrer la naissance dans le registre de l’état civil et délivrer ainsi l’acte de naissance.

A ce jour, en ce qui concerne la ville de Bangui, seule la Mairie de Bangui détient le monopole de la délivrance des actes de naissance tandis que les autres municipalités des arrondissements ne sont pas impliquées dans ce processus. Une centralisation qui pénalise des parents qui doivent quitter loin pour se rendre à la mairie centrale pour chercher ce document.

Aujourd’hui, la capitale Bangui dispose de 9 arrondissements en plus des communes de Bimbo et de Begoua qui disposent de cette autonomie pour la délivrance des actes de naissance.

Tout dépend des lois

En effet, pour comprendre les raisons de cette exigence administrative, la rédaction de l’Oubangui Médias s’est rapprochée des mairies de quelques arrondissements de la capitale pour en savoir plus.

Selon les sources rencontrées, l’ordonnance N°88.006 du 12 février 1988 relative à l’organisation des collectivités territoriales et des circonscriptions administratives, modifiée par la loi 88.003 du 03 avril 1988, qui a longtemps encadré le fonctionnement des communes, n’est pas explicite sur cette question. Elle dispose seulement que dans les zones rurales, le chef de village veille aux déclarations, dans les délais réglementaires, des naissances, décès et mariages au centre d’état civil de rattachement.

Et, pour la ville de Bangui et les centres urbains des villes de l’intérieur du pays, l’ordonnance dispose que les agglomérations urbaines sont constituées de quartiers, de groupes et arrondissements qui sont chargés de l’exécution des décisions des autorités administratives et des autorités de la commune.

Les chefs de quartier ont les attributions identiques à ceux des chefs de village dans les zones rurales et que les quartiers, groupes et arrondissements ne constituent pas des collectivités territoriales. Du coup, ils sont exclus de la délivrance des documents d’état civil qui relèvent de la compétence des autorités des collectivités territoriales.

D’après un responsable de la Mairie du 6e arrondissement de Bangui, c’est l’avènement de la décentralisation matérialisée par la loi 20.008 du 07 avril 2020 portant organisation et fonctionnement des collectivités territoriales qui est la solution à ces difficultés. En son article 205, cette loi stipule que : Les présidents des Comités d’Arrondissements sont des Officiers de l’Etat-Civil et Officiers de police administrative dans leurs Arrondissements respectifs.

Quant à l’article 201 de cette même loi, il dispose que les présidents des comités administratifs d’arrondissement sont des adjoints au maire de la commune de Bangui. A ce titre, ils reçoivent des délégations permanentes du Maire et dispose également d’attributions propres. 

Malgré l’existence de cette loi, certains agents des mairies se montrent toujours réserver dans leur interprétations.  C’est le cas par exemple de Monsieur  Samson Sazon Mangué, conseiller à la Mairie du 6e arrondissement de Bangui qui nous  justifie cette centralisation en évoquant que : « Les maires ne sont pas assermentés. Ils n’ont pas la possibilité de la délivrance d’acte de naissance, pour délivrer cela il faut avoir un officier d’état civil assermenté. Le deuxième point, c’est d’abord le problème de la décentralisation. La loi a été déjà votée, nous attendons les décrets d’application afin qu’il ait la possibilité de la délivrance dans chaque arrondissement ».

L’article 203 de la même loi est clair ! Elle souligne que les présidents des comités administratifs d’Arrondissement reçoivent des délégations permanentes du maire dans les domaines suivants : l’expédition des actes de l’état civil, l’exécution des lois et règlements dans le ressort de leurs arrondissements, l’exécution des actes de l’autorité de tutelle, la délivrance des certificats d’hébergement, la voirie urbaine, la police municipale.

Des nombreux parents et acteurs de la société civile que la rédaction du Journal Oubangui Médias a rencontré à Bangui s’interrogent sur les raisons qui bloquent l’application des prescrits de cette loi trois après sa promulgation.  Ils estiment que c’est une bonne chose d’avoir des lois qui guident le fonctionnement de l’administration publique mais que d’autre part, il faut les vulgariser, en assurer le suivi de la mise en œuvre, fournir les moyens conséquents pour leur mise en œuvre effective et dans le cas échéant, sanctionner les personnes qui peuvent bloquer l’effectivité de la mise en œuvre de lois.

Il est important et même urgent que les comités administratifs d’arrondissement puissent fonctionner comme l’exige la loi et qu’ils recouvrent l’ensemble de leurs  attributions afin que les parents d’enfants soient en mesure de se faire délivrer les documents d’état civil dans les environs de leurs lieux de résidence. 

La modernisation de l’état civil, une préoccupation du gouvernement et ses partenaires

Alors que le domaine de l’état civil reste une préoccupation nationale, le Gouvernement centrafricain a bénéficié de l’appui de l’Union européenne pour la modernisation de l’état civil.

Financé sur les 11e fonds européens de développement (11e FED), mise en œuvre avec l’expertise de Civipol, ce projet va permettre de doter le pays d’une Politique Nationale de l’Etat Civil.  Le rapport de diagnostique relatif à l’élaboration de cette politique a été adopté le 18 octobre dernier lors 3ème réunion du  Comité Technique d’Appui et de Suivi (CTAS) de l’Élaboration de la Politique Nationale de l’État Civil. Il est donc urgent que le document de cette politique soit mise en place le plus urgemment possible pour espérer remettre de l’ordre dans ce secteur vital de l’administration publique.

Au regard des aspirations de tous les centrafricains de voir le développement du pays décoller après toutes ces années passées de crises, la modernisation de l’état civil est une urgence et un point de départ en ce sens qu’elle va permettre au pays de disposer des statistiques correctes sur la démographie de la population et servir aussi d’outil de planification du développement et de la sécurité du pays.

Dorcas Bangui Yabanga