La ville de Ndele, chef lieu de la préfecture de Bamingui Bangoran au nord de la Centrafrique a fait face à des nombreuses violences depuis près d’une décennie. Conflits entre transhumants et agriculteurs, présence des groupes armés, cette respire grâce aux interventions des casques bleus de la Minusca et surtout après le redéploiement des Forces de Défense et de sécurité. Le Sultan maire Senoussi Ibrahim a accepté de répondre aux questions de Oubangui Médias en mission de presse dans la localité, une mission facilitée par la Minusca.

Oubangui Médias : Quelle est l’état de la sécurité dans la ville de Ndele?

Senoussi Ibrahim : Merci. Pour le moment, la situation sécuritaire est stable depuis l’arrivée des forces de défense et de sécurité il y a un an et avec celle des alliés russes qui a changé beaucoup de choses sur le plan sécuritaire. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes totalement à l’abris. Non. Nous allons vers la saison sèche qui est un cauchemar pour nous parce que les frontières sont poreuses et les gens traversent comme ils le veulent à tel point que nous nous inquiétons. C’est pourquoi, nous demandons au gouvernement de renforcer les troupes et les matériels afin de sécuriser nos frontières. La réalité est que nos frontières ne sont pas sécurisées et cela nous inquiète.

Oubangui Médias : Qui sont ceux qui rentrent le plus souvent, des éleveurs armés ?

Senoussi Ibrahim : Certainement puisque les frontières ne sont pas sécurisées et notre inquiétude est qu’est-ce qu’ils amènent aux côtés des boeufs. C’est un danger pour la population si le pays ne parvient pas à contrôler ses frontières.

Oubangui Médias : Monsieur le sultan Maire, dites nous comment la population de Ndele avait vécu la période CPC?

Senoussi Ibrahim : En toute sincérité, nous ne connaissons pas la CPC ici à Ndele.

Oubangui Médias : Donc se sont les éleveurs qui traumatisent la population ?

Senoussi Ibrahim : Effectivement. Le problème qui est là c’est la transhumance. On ne peux pas traiter les transhumants comme CPC, ils ont existé depuis plusieurs années mais à cause de l’insécurité, eux-mêmes se promènent avec des armes. Il y a de cela quelques mois, ils ont tués 14 personnes à « Tiri ». Là encore, ils commencent à traverser les frontières librement, voilà un autre danger pour la population.

Oubangui Médias : Alors quelles sont les forces qui vous aident à maintenir la sécurité à Ndele et les autres communes de Bamingui Bangoran ?

Senoussi Ibrahim : Maintenant avec nos alliés russes et les Forces Armées Centrafricaines, les choses s’organisent. Ces forces ont la volonté de ratisser. Pourvu qu’elles montent en capacité et qu’elles aient les moyens pour sécuriser la zone.

Oubangui Médias : Et la Minusca que fait-elle ici ?

Senoussi Ibrahim : A propos de la Minusca, nous allons parler sur deux volets. Il y a la Minusca forces et la Minusca civile.
Du point de vue forces jusqu’à présent, nous ne sommes pas satisfaits parce que l’immensité de la préfecture les dépasse (58250 km2), vu le nombre des militaires affectés ici, cela ne résout pas le problème. Donc, ils ne sont pas nombreux, ils n’ont pas de matériels, il n’y a pas de patrouilles hebdomadaires à travers la préfecture. Ils sont seulement à Ndele soit à Bamingui et c’est fini. Ces forces se donnent beaucoup pour les escortes humanitaires mais pas vraiment pour la sécurité. Nous souhaitons que la situation change sinon on se pose la question si ces forces sont réellement là pour nous. Quand il n’y avait pas les alliés et les FACA, c’était la FPRC. La Minusca ne faisait pas assez des patrouilles et la population vivait au bon vouloir de Dieu.
Pour le volet Minusca civile, il y a tellement d’avancée que je ne citerais pas tous. Depuis trois avec l’arrivée du chef de bureau, il y’a des infrastructures qui sont construites sur financement de la Minusca. En plus de cela, nous organisons des sensibilisations pour la paix et la réconciliation.
En ce qui concerne la restauration de l’autorité de l’Etat, la Minusca appui. Mais il y a un problème en ce qui concerne le redéploiement des fonctionnaires. Le processus est très lent et à un moment donné, ça donne le découragement. Donc pour restaurer l’autorité de l’État en tant que telle, il faut que la procédure soit fluide. À l’exemple, c’est la rentrée des classes. Certainement nous aurons des enseignants affectés ici mais compte tenu de l’impraticabilité de la route, nous souhaitons que la Minusca aide au redéploiement de ces fonctionnaires. Parfois, il faut attendre deux à trois mois. C’est pourquoi la Minusca qui appuie la restauration de l’autorité de l’Etat devra nous aider dans ce sens.
En ce qui concerne le projet à impact rapide, que cela accompagne notre plan local de développement. Les finances locales ne sont pas stabilisées donc c’est sur les partenaires que nous comptons. Le palais de la justice est en construction, le commissariat devrait être réhabilité mais l’entreprise ne vient toujours pas. La Minusca fait son mieux ici à Ndele.

Oubangui Médias : Mais que sont devenus les éléments du FPRC aujourd’hui ?
Senoussi Ibrahim : Oui la majorité a déposé les armes. D’autres ont été recrutés dans l’armée et les FSI. D’autres attendent les USMS. Certains ont été réintégrés dans la vie civile. Ceux qui ne sont pas pour la paix sont partis vers Ndah. Donc là, la ville est calme et ce sont nos forces avec l’appui de la Minusca qui assurent la sécurité.

Oubangui Médias : En tant que sultan Maire qu’attendez vous concrètement pour la sécurité dans la Bamingui Bangoran ?

Senoussi Ibrahim : Nous voulons que le gouvernement prenne ses responsabilités. Et la Minusca doit penser à renforcer l’effectif des militaires.
Le problème ne se trouve pas à Ndele. Mais le véritable problème c’est à la frontière. Si on parvient à contrôler ceux qui rentrent, on limitera les dégâts et Ndele sera en sécurité. Donc l’enjeu c’est de sécuriser les frontières pour garantir la sécurité dans toute la zone. Aussi, un militaire à la frontière, c’est des moyens à mettre à leur disposition. Ce qui nous préoccupe ici, c’est la sécurité de nos frontières. De Golongosso à Ngarba, même pas un seul militaire et ça doit inquiéter.
Oubangui Médias : Monsieur le sultan Maire, quels sont les projets de développement que vous disposez ?

Senoussi Ibrahim : Nous avons plusieurs projets, mais ce sont les moyens qui nous manquent. La ville n’a pas l’air d’être une ville. Après une dizaine année de crise, la ville est à terre et il faut la relever. Nous avons initié un plan local de développement, soutenu par le PNUD qui est déjà sorti et d’ici 2022 nous commencerons la mise en œuvre.
Aussi, nous avons engagé une entreprise pour faire un plan d’aménagement de la ville de Ndele, le document est en cours d’élaboration et nous chercherons des partenaires pour mettre en œuvre l’urbanisation de Ndele sous le contrôle du gouvernement.
Nous allons pas à pas tellement qu’il y a beaucoup de besoins et des priorités. Si nous stabilisons nos finances publiques, nous pourrons contribueront à hauteur de 40% dans ce plan.

Oubangui Médias: Monsieur le sultan Maire, nous vous remercions

Senoussi Ibrahim : C’est à moi de vous remercier.
Interview réalisée par Fridolin Ngoulou