La République Centrafricaine a célébré le 13 août dernier, le 62e anniversaire de son indépendance. En bâton rompu avec Oubangui Médias, Laurent Gomina Pampali, écrivain politiste et enseignant de la philosophie politique et morale, a évoqué les antivaleurs qui empêchent le développement de la Centrafrique et appelle le peuple centrafricain à la prise de conscience patriotique pour sortir le pays de gouffre de la pauvreté.

« Le pays devrait normalement avoir un leader pour conduire le destin de son peuple si Barthélemy Boganda était resté quelques années après la proclamation de l’indépendance. Il était décédé en 1959 et l’indépendance sera proclamée en 1960. Jusqu’aujourd’hui, le pays n’a pas grandi politiquement, idéologiquement, économiquement et socialement. Barthélémy Boganda était un visionnaire. Il avait évoqué clairement les antivaleurs qui ont fait le malheur de notre pays à l’époque coloniale. Notamment : la division, le tribalisme, le clanisme et l’égoïsme, et cela continuent de faire le malheur de notre jusqu’aujourd’hui même dans l’avenir, si nous ne prenions pas conscience, » a déclaré, Laurent Gomina Pampali d’entrée de jeu.

Selon Laurent Gomina Pampali, la célébration de la fête de l’indépendance devrait être une occasion pour le peuple centrafricain de prendre conscience de beaucoup de choses qui sont à l’origine de l’instabilité politique et d’en finir avec ces maux qui empêchent le pays à prendre le chemin du développement. « Le 13 août est une date historique, une date qui doit nous faire prendre conscience de beaucoup de choses. Nous devons nous interroger si nous sommes de peuple au sens politique vrai, c’est-à-dire un ensemble de citoyens occupant un territoire ayant en tête l’amour de ce territoire, ayant le même destin », ajoute-il.

En parlant ainsi, Laurent Gomina Pampali faisait allusion aux leaders et militants des partis et associations politiques qui, au lieu de défendre l’intérêt national, privilégient  leurs intérêts égoïstes causant le déclin du développement socio-économique du pays. Pour lui, ces actions devraient converger vers la consolidation du « destin commun » des centrafricains.

« Il n’y a pas de délai pour la liberté »

Dans la rue, beaucoup d’observateurs sociaux-politiques pensent que l’indépendance avait été demandée trop tôt. Selon eux, le président Barthélemy Boganda se serait précipité de demander l’indépendance de la Centrafrique. Car, disent-ils, Barthélemy Boganda devrait laisser le temps à la puissance coloniale de pouvoir construire d’abord le pays avant de demander son  indépendance.  Laurent Gomina Pampali ne partage pas cette assertion. « Je demande au peuple centrafricain d’abandonner ce raisonnement fatidique qui n’est pas valide. En matière de liberté, il n’y a pas de délai. Jean Jacques Rousseau disait dans l’une de ses déclarations qu’«  Il n’y a pas de délai pour la liberté ». Cela veut dire que si un esclave reste toujours esclave sous maître, c’est par ce qu’il n’a pas de moyen pour se libérer très tôt. L’Oubangui Chari était une colonie d’exploitation de la puissance colonisatrice. Les colons venaient exploiter seulement notre pays et piller nos richesses. Avez-vous trouvez les traces du chemin de fer en Centrafrique ? » S’interroge-t-il.

« Il y a eu d’autres colonies comme le Sénégal, le Gabon pour ne citer que ceux-là. Ils avaient des intentions de s’installer d’en faire des départements  français. La RCA était juste une colonie où ils venaient chercher les caoutchoucs, le café, l’or, le diamant, l’uranium, le bois etc. Boganda pensait à l’époque que le moment était venu pour que les oubanguiens se débarrassent du joug colonial. Il faut que les centrafricains retiennent cela une fois pour toute et qu’ils ne reprochent rien à Boganda. Barthélemy Boganda savait ce qui devait être fait en temps réel», a expliqué cet enseignant de la philosophie politique et morale. 

Si aujourd’hui les militants des partis et associations politiques se prêtent à la diffusion des messages de haine tant sur les réseaux sociaux que sur les ondes, Laurent Gomina Pampali, pense que ces comportements ne font qu’enfoncer le pays dans la boue. Selon lui, les leaders politiques doivent former leurs militants sur la notion de la citoyenneté, le patriotisme, la démocratie, le respect des droits humains etc. Il souhaite que la formation civique et l’éthique soit instaurées dès l’école primaire, au secondaire et à l’université.

Laurent Gomina Pampali appelle à une prise de conscience nationale de toutes les couches sociales. Aussi, l’homme à la plume invite le pouvoir et l’opposition à privilégier l’intérêt supérieur de la nation et à prôner le dialogue comme mécanisme de résolution de leurs différends afin de préserver la paix et parvenir au développement durable du pays.

Pétrus Namkoina