L’insécurité encore présente dans le pays, la dégradation des voies routières en cette saison des pluies et les effets de la Covid-19 sont autant des maux qui empêchent l’assistance humanitaire dans le pays. Une situation déplorée mercredi 25 aout lors d’une conférence de presse conjointe de la Coordonnatrice humanitaire Denise Brown et la ministre de l’Action Humanitaire Virginie Baïkoua à Bangui.

Alors que l’insécurité alimentaire menace encore le pays, le pays fait face à l’insécurité causée par des groupes armés, surtout à l’intérieur du pays. Même si le gouvernement s’évertue à libérer le territoire pour faciliter l’accès aux populations ayant besoin d’aide humanitaire, sur le terrain, la situation se complique en cette période des pluies.

Selon la coordonnatrice humanitaire Denise Brown, plus de 250.000 personnes les plus vulnérables ne peuvent pas actuellement bénéficier de l’assistance humanitaire, en raison d’insécurité notamment des engins explosifs posés par des hommes armés. Elle invite les parties en conflit à faciliter l’accès aux personnes vulnérables.

Virginie Baïkoua, consciente des conditions difficiles de la population causée par l’insécurité soutien que le gouvernement met tout en œuvre pour libérer le territoire et faciliter l’accès aux personnes vulnérables.

Rapport sur la situation humanitaire, aout 2021:  Cri d’alarme face à l’insécurité alimentaire galopante

La République centrafricaine (RCA) est un pays fertile. Il pleut abondamment, le sol est riche et une variété de cultures, de fruits et de légumes poussent presque toute l’année. Malgré cette apparente abondance, une personne sur deux ne mange pas à sa faim.

La raison en est le conflit qui s’est à nouveau intensifié depuis le début de l’année. Le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays n’a jamais été aussi élevé depuis 2014 atteignant désormais 691 000 personnes, et même plus au cours des derniers mois. Les populations vivent dans la peur des attaques et des exactions des groupes armés, ce qui limite leur mobilité et leur accès aux champs et aux forêts pour cultiver, cueillir et chasser. Cet environnement dangereux empêche en outre les organisations humanitaires d’atteindre les personnes dans le besoin. L’une des conséquences est la détérioration continue de la sécurité alimentaire depuis l’année dernière.

Un tableau sombre

Les indicateurs relatifs à la nutrition et à la sécurité alimentaire pour la période de soudure d’avril à août étaient déjà sombres, mais ils se sont à nouveau dégradés en juillet.

En avril, la RCA a signalé le deuxième plus grand nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire critique en Afrique de l’Ouest et du Centre – la phase d’urgence, selon la classification standard mondiale de l’insécurité alimentaire aiguë. En juillet, ce chiffre avait augmenté de 58% par rapport à avril, atteignant 1 million de personnes en insécurité alimentaire critique.

Les données de surveillance suggèrent qu’en juillet, globalement 2,6 millions de personnes, soit 57% de la population centrafricaine, n’avaient pas assez à manger. Sur le million de personnes en situation d’urgence concernant leur consommation alimentaire, 250 000 étaient à un pas de la famine. Pire encore, ces personnes étaient et demeurent largement inaccessibles aux travailleurs humanitaires.

Un appel urgent

Le Cluster Sécurité alimentaire, qui réunit les acteurs humanitaires travaillant dans ce secteur, tire la sonnette d’alarme face à la montée en flèche de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition en RCA. Si la réponse humanitaire ne s’intensifie pas immédiatement, plus de 2 millions de personnes seront en situation d’insécurité alimentaire d’ici septembre ; parmi elles, 900 000 personnes resteront en phase d’urgence et au moins 250 000 risquent de tomber dans la famine.

La fin du conflit n’étant pas en vue, la grande majorité de personnes touchées par la crise continueront à dépendre de l’aide humanitaire dans les mois à venir. Sans un accès humanitaire libre aux zones où l’insécurité alimentaire est la plus forte, un quart de million de personnes vont sombrer dans la catastrophe alimentaire.

Le secteur de l’alimentation a urgemment besoin de 22,5 millions de dollars américains pour fournir une assistance alimentaire à ration complète pendant 3 mois aux 250 000 personnes les plus exposées à une situation alimentaire catastrophique, y compris pour aider par voie aérienne celles qui se trouvent dans des zones difficiles à atteindre.

Seulement la moitié du Plan de réponse humanitaire 2021 du pays est actuellement financée. Le manque de ressources face à l’explosion des besoins de la population a déjà contraint le Programme alimentaire mondial (PAM) à réduire l’assistance alimentaire mensuelle à une ration de 20 jours.

 La malnutrition des enfants

En juillet, 80 000 enfants de moins de 5 ans étaient à risque de malnutrition aiguë sévère (MAS), soit une augmentation de 29% depuis fin 2020. Le risque de MAS est particulièrement élevé pour les enfants déplacés et ceux qui se trouvent dans des endroits touchés par le conflit, où l’accès à la nourriture, à l’eau potable, aux soins de santé et aux services de nutrition a été sévèrement restreint et où les prix des aliments ont explosé.

A travers le pays, 395 000 enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique, 40% de tous les enfants de cette tranche d’âge – un taux considérablement supérieur au seuil d’urgence de 30%. Une nutrition inadéquate sur une longue période perturbe leur croissance. La malnutrition aiguë représente un problème majeur de santé publique et constitue l’une des principales causes de morbidité et de mortalité chez les jeunes enfants.

 Le lien avec les restrictions d’accès

Les données de surveillance humanitaire indiquent un lien direct entre le conflit, les difficultés d’accès croissantes et la forte augmentation de l’insécurité alimentaire. L’accès humanitaire aux zones du nord-ouest (préfectures de l’Ouham et de l’Ouham-Pendé) et du sud-est (préfectures de la Basse-Kotto, du Haut-Mbomou et du Mbomou) est entravé par le conflit actif, le déplacement des lignes de front et la présence d’engins explosifs. Ces mêmes facteurs limitent l’accès aux champs, la mobilité des éleveurs migrants et l’approvisionnement des marchés. La saison des pluies, d’avril à octobre, restreint encore davantage la capacité des organisations humanitaires à acheminer l’aide à grande échelle et à un prix abordable par la route.

 L’assistance fournie

Au cours du premier semestre 2021, 1,29 million de personnes ont reçu une assistance alimentaire vitale de la part des partenaires humanitaires. L’accès humanitaire reste très restreint, voire impossible, dans plusieurs localités des préfectures de Ouham-Pendé, du Haut-Mbomou, de la Basse-Kotto et de la Ouaka.

De janvier à mai, 529 000 personnes ont reçu des traitements contre la malnutrition ou des suppléments pour la prévenir, dont 14 000 enfants souffrant de SAM, 24 041 enfants souffrant de malnutrition aiguë modérée et 19 000 femmes enceintes et allaitantes.

Au cours de la saison agricole actuelle, 60 900 ménages en situation d’insécurité alimentaire, soit 305 000 personnes, reçoivent une aide d’urgence pour rétablir les moyens de subsistance agricoles grâce à la distribution de semences et d’outils, au restockage de bétail et à des transferts monétaires.

En juin, la Banque mondiale a approuvé une subvention de 50 millions de dollars US pour stimuler la production alimentaire et renforcer la résilience des éleveurs et d’autres ménages en situation d’insécurité alimentaire. Ce financement apportera un soutien indispensable à plus de 465 000 personnes en situation d’insécurité alimentaire par le biais d’activités de travail contre rémunération, tout en réhabilitant les infrastructures agricoles à petite échelle dans six préfectures de l’ouest, du centre du pays et dans la capitale Bangui.

 Investir dans des solutions durables

Les partenaires humanitaires investissent également dans des solutions durables pour la prévention et la gestion de la malnutrition, notamment la promotion d’aliments nutritifs, de bonnes pratiques alimentaires pour les nourrissons, les enfants et les femmes enceintes et allaitantes, et une réponse multisectorielle liée à la fourniture de services sociaux de base de qualité, notamment l’eau, l’assainissement et l’hygiène, les soins de santé et la protection.

Aperçu des incidents ayant touché les travailleurs humanitaires

La population civile continue de payer le prix des tensions et des violences qui se poursuivent dans plusieurs parties du pays.

La République centrafricaine demeure l’un des endroits les plus dangereux pour le personnel humanitaire avec 297 incidents affectant les travailleurs humanitaires pendant les sept premiers mois de 2021 comparés à 230 incidents pendant la même période en 2020.

Les sous-préfectures les plus touchées sont celles de Bossangoa, Kaga-Bandoro et Bangui.

Un agent humanitaire a perdu la vie à Bangui dans sa résidence lors d’un braquage armé à domicile et quatre humanitaires ont été blessés à la suite de braquages routiers dans les provinces.

 Les vols, braquages, pillages, menaces et agressions représentent 68% des incidents, soit 202 sur 297. Les interférences et restrictions représentent les autres 32% des incidents.

OCHA