La situation sécuritaire inquiète la population en cette période qui marque les débuts de la saison sèche, une saison où les groupes armés opèrent le plus souvent dans le pays.  Face aux dernières attaques proches de Bambari, à Ngakobo et les menaces qui pèsent sur Alindao, Bangassou et Bangui la capitale, Albert Yaloke Mokpem, ministre conseiller en Communication, porte-parole de la Présidence de la République se dit conscient de ces menaces, alors que l’armée est en alerte. Il a aussi abordé le samedi dernier les sujets d’actualité de la semaine lors d’un point de presse.

Monsieur le ministre, quelle lecture faites-vous des violences de ces derniers jours près de Bambari et des rumeurs d’attaque sur Bangui ?

Nous voyons que les pressions viennent de toute part et notamment les actes de sabotage et les crimes perpétrés. Mais, les Centrafricains ne sont pas prêts à faire participer les rebelles au dialogue.

Quand on parle de Bambari, de Ngakobo, d’Alindao… c’est le même mode opératoire. Les rebelles sont fournis de plus en plus avec des mines anti personnels, des mines antichars qui causent des dégâts auprès de la population. ils s’attaquent maintenant aux convois.

L’axe Bambari-Alindao est sous la protection de la Minusca. Ce jour-là, il y avait très peu de présence des casques bleus. Généralement, des convois sont protégés et en fonction des zones, cela peut être des FACA avec les alliés, les FACA avec la Minusca ou la Minusca seule. Sur le cas Bambari, il y a eu des témoignages que les éléments de la Minusca ont été sollicités pour la sécurité du convoi mais l’équipe n’est pas venue. Nous vérifions tout cela.

Mais de notre côté, des dispositions sont prises déjà pour pallier à des éventualités, des renforts ont été largement envoyés dans la zone. La population réclame les FACA et les alliés russes et rwandais, contrairement à ce que les gens disent. La bataille est médiatique car les gens veulent nous raconter tout et de rien, mais les centrafricains ne sont pas dupes. Les gens veulent casser l’élan de ce qui se passe dans le pays. Là où les FACA sont déployés avec les alliés, la paix est restaurée. Nous avions fait un bon choix de faire appel aux forces bilatérales.

Nous savons très bien qu’il y a des grandes puissances derrières ces groupes armés. Les gens mettent tout en œuvre pour discréditer les FACA et leurs alliés  sur toutes les chaines médiatiques mais les volumes ne sont pas les mêmes quand les groupes armés s’attaquent à la population civile comme le cas de Bambari. Donc, quand les rebelles commettent des exactions, évoluent dans leur plan, ils servent les intérêts étrangers.

Vous verrez, le temps que nous avons pour aller au dialogue, il y aura des turbulences. Mais nos forces de défense et de sécurité sont en alerte et se préparent à faire face à des éventualités.

Est-ce que les mesures sont-elles prises dans les zones où la tension est en train de monter ?

Pendant les consultations nationales, les délégués ont observé que quand les FACA et les alliés ont libéré des villes, ils progressent dans leur marche, mais malheureusement les rebelles qui se sont dispersés dans la brousse reviennent semer le trouble. Ils ont demandé à ce qu’on puisse mettre des bases des FACA dans toutes les villes. Là, il nous faut des hommes, il nous faut du matériel et vous voyez les difficultés que nous avons, l’histoire de l’embargo que nous réclamons la levée totale. On ne peut pas être partout et donc, il faut repartir le travail.

Nous pouvons faire mieux comme nous l’avions fait en déployant les FACA et les alliés. Ce qu’il faut savoir, il y aura des poches de crise par endroit dans tout le pays. Nous nous préparons à cela, même Bangui n’est pas à l’abri.

Dans le cadre de la coopération bilatérale, nous avons des moyens, nous avons des hélicoptères qui aident dans les opérations militaires.

Autre sujet, le gouvernement a mis fin à la mission économique russe auprès de la douane. La Présidence est-elle  satisfaite de cette collaboration?

Vous savez, cette opération a été faite comme l’ENA français auprès de l’ENAM. Ils sont venus former les douaniers et d’autres cadres des finances, des impôts mais l’applicabilité sur le terrain ne donne pas des résultats escomptés.

Les russes sont venus et sont allés sur le terrain pour montrer comment les douaniers doivent procéder. C’est une opération qui devrait durer dans le temps et par la suite il faut passer à d’autres phases. Ce n’est pas à eux de venir faire le travail des douaniers à notre place. Avant, les commerçants se font avoir en payant sur chaque barrière de la douane. Ce qui revenait plus chers que de payer une seul fois grâce à l’expertise russe. Les commerçants ont eux-mêmes constaté. Le travail des russes a démontré cela auprès de la Douane.

Le gouvernement fera bientôt ses 100 jours, comment appréciez-vous ce gouvernement ?

Le chemin est parsemé d’embuche mais il y a des jours heureux. Le gouvernement d’Henri-Marie Dondra a été mis en défiance parce que les gens avaient taxé Firmin Ngrebada de favoriser l’axe Bangui-Moscou et que son départ était une manière d’infléchir cette ligne. Voilà pourquoi quand le gouvernement Dondra est arrivé, les gens attendaient un certain nombre de geste. Les attentes sont différentes : Celles de la population, de la communauté internationale et des observateurs. Nous sommes devenus comme un laboratoire et les gens nous observent, nous critiquent et nous soutiennent. Pendant les 100 jours, le gouvernement a travaillé sur le dialogue, sur la coopération sous régionale. Nous avons refusé de travailler pour résoudre notre problème ailleurs, par les autres comme cela se faisait où nos problèmes sont sous-traités ailleurs. Aussi, nous avons des partenaires traditionnels avec lesquels nous avons intensifié les relations. C’est le travail que le Premier ministre a fait auprès de ces partenaires pour expliquer nos démarches.

Vous savez, notre pays est frappé par deux embargo : celui des armes et l’embargo sur les mines. Le gouvernement a fait un grand travail dans ce sens.

Comment avez-vous fait pour combler le gap de l’aide budgétaire après la suspension de celle de la France ?

Nous sommes certes privés des ressources mais nous continuons de vivre. Nous faisons face à nos échéances. C’est vrai, il n y a pas que l’option militaire, il faut passer à la relance de l’économie ; au développement économique et sociale. Tout le monde voyait à Ngrebada l’option militaire. Avec Dondra c’est l’option de la relance économique. Il faut élargir l’assiette fiscale, c’est pourquoi son successeur Hervé Ndoba travaille dans la même continuité que ce que Dondra a fait quand il était Ministre des Finances. Le pays est passé à la numérisation des recettes. Les gens payaient des taxes à des postes de recettes disparates mais au final, c’est très peu qui atterrissait dans la caisse de l’Etat. Voilà pourquoi aujourd’hui la numérisation des recettes permet de pallier à ce manquement de la suspension de l’aide budgétaire de la France.

Au niveau du gouvernement, ils trouvent d’autres alternatives à ce manque à gagner avec l’ingéniosité. Nous diversifions nos moyens pour faire face à cette situation.

Est-cela porte déjà des fruits ?

Nous faisons face à nos échéances.  L’inconvénient dans cette histoire ce sont les obstacles guerriers qu’on met en face de nous pour nous empêcher de prendre possession des ressources de notre pays. Quand je dis qu’il y a des forces étrangères derrières les groupes armés et ces groupes armés occupent illégalement des sites miniers pour nous empêcher de trouver des ressources, ce que nous devons nous battre pour répondre à ce type de situation.

Propos recueillis par Fridolin Ngoulou