Le premier procès devant la Cour Pénale Spéciale (CPS), a été lancé mardi 19 avril 2022 à Bangui. Trois présumés sont poursuivis pour affaires Koundjili et Lemouna dans l’Ouham-Pendé où plus de 40 civiles ont été tués. Le ministre d’Etat à la justice Dr. Arnaud Djoubaye Abazene soutient que ce premier va écrire une nouvelle page de la justice centrafricaine, à travers cette juridiction mixte, composée des juges nationaux et internationaux.

« A l’occasion de cette journée spéciale où il sera question d’écrire une nouvelle page de l’histoire de la justice de notre pays à travers l’audience solennelle de la Cour Pénale Spéciale, il convient de rappeler que la République Centrafricaine notre très cher et beau pays a été marqué depuis son accession à la souveraineté internationale par des violents conflits qui ont entrainé des milliers de morts et d’immense déplacement de population dont à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, qui ont fait de nombreuses victimes dont la plupart sont des personnes vulnérables à savoir des enfants, des femmes et des personnes à mobilité réduite lesquels attentes que la justice leur soit rendue car ces violences ont atteint leur paroxysme », a déclaré à l’ouverture de l’audience le ministre d’Etat Arnaud Djoubaye Abazene.

Pour le ministre d’Etat en charge de la justice, ce procès est un signal fort que les crimes graves ne seront plus tolérés, envoyé aux auteurs de violations des droits de l’Homme et des droits humanitaires international.

La CPS, cette juridiction de droit centrafricain créée en 2015 est devenue opérationnelle en 2018. Son objectif vise à lutter contre l’impunité pour des crimes graves commis en République centrafricaine depuis 2003. Dès son accession à la magistrature suprême en 2016 puis en 2021, le président Faustin Archange Touadera,  conscient de ce désir de justice exprimé par le peuple centrafricain, a fait de la lutte contre l’impunité dans toutes ses formes la colonne vertébrale de son mandat. Ce procès est l’illustration de la réussite de politique et de la promesse faite aux peuples centrafricains.

Cette Cour va juger les crimes internationaux car l’Etat centrafricain est dans l’obligation de juger les responsables de graves violations du droit international humanitaire dont les crimes de guerres et les crimes contre l’humanité commis sur notre territoire centrafricain.

Le dossier enregistré au rôle de ce premier procès est le massacre, meurtre et viols en mai 2019 de plus 40 civils, lâchement abattus par des éléments du groupe armé 3R, dans les villages Koundjili et Lemouna dans la préfecture de l’Ouham-Pendé. Par ailleurs, les trois accusés, Issa Sallet Adoum alias Bozizé, Yaouba Ousmane et Mahamat Tahir sont soupçonnés de crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Le ministre Abazene souligne que faire la justice pour les crimes graves est un impératif pour une paix véritable et durable en RCA. L’impunité qui sévit en RCA depuis plusieurs décennies a incité des nouveaux crimes. «  Des procès justes et équitables ne sont pas seulement une obligation envers les victimes qui ont souffert des crimes atroces, mais enverront aussi un signal fort et vraiment très fort indiquant que les crimes graves ne seront plus tolérés », a lancé le ministre d’Etat.

Pour ne pas être un vain mot le gouvernement de la RCA en dépit des difficultés rencontrées et avec l’appui de la communauté internationale ainsi que des différents partenaires techniques et financiers a contribué sensiblement dans le cadre de la justice transitionnelle, au processus non seulement de l’opérationnalisation de la CVRR ou ces membres sont légalement investis dans leur fonction mais et surtout de l’effectivité de la CPS.

 Aujourd’hui avec l’ouverture solennelle de cette audience la CPS est définitivement entrée dans sa phase opérationnelle marquant ainsi le glas contre l’impunité, la soif de justice continuellement exprimée par la population.

Des réactions suite au report technique du procès

Après l’ouverture officielle des audiences, la Cour a constaté que les présumés se sont présentés sans la présence de leurs avocats. Le président de la cour ordonne au greffier en chef de procéder à l’assignation d’office des avocats pour procéder à la défense des accusés. Des réactions n’ont pas tardé à être enregistrées.

Arnaud Yaliki, président de l’Observatoire Centrafricain pour la Justice Transitionnelle s’en explique : « Les présumés auteurs ont des droits selon l’article 119 de la loi portant preuve et procédure qui prévoit dans ce cas, doit être défendus par des avocats. L’espoir demeure que le 25 avril 2022 ce procès se tiendra pour juger les présumés coupables et indemniser les victimes ».

La plateforme des associations des victimes se sent indigner de constater l’absence des conseils des accusés devant la barre. Cependant, elle espère que ce procès tiens lieu, que la justice leur soit rendue et que les auteurs présumés de ces violations graves croupissent en prison et que les victimes soient indemnisées.

L’inspecteur de service judiciaire Joseph Bindoumi n’est pas resté en marge des réactions. Il fait observer que préalablement, il n’y a pas d’entente entre les avocats et la CPS sur la question des honoraires et ces derniers se plaignent qu’aucun respect n’a été observé à leur égard d’où ils ont boycotté cette audience. «Il est judicieux d’entamer une négociation car ces conseils étaient au début des instructions et qu’on ne peut pas faire avec des avocats d’office qui ne maitrisent pas les dossiers ».

La CPS reste un espoir que la manifestation de la vérité au sujet de multiples crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis sur le territoire centrafricain depuis 2003.

Assimby Komodou