A l’occasion de la journée mondiale de la santé, Oubangui Médias a tendu son micro à l’équipe des Médecins Sans Frontières (MSF) qui appuie la prise en charge sanitaire des plus vulnérables dans le pays. Docteur Emmanuel Lampaert soutient que son organisation reste engager à appuyer la prise en charge sanitaire dans le pays.

OBM- Bonjour Emmanuel Lampaert. Vous êtes revenu en Centrafrique depuis quelques mois, dites-nous quelle lecture faites-vous sur la situation sanitaire depuis la résurgence des nouvelles violences dans le pays ?

E.L- Je suis revenu sur le territoire Centrafricain depuis fin Novembre, et donc j’ai pu voir cette intendance clairement en lien avec la recrudescence des violences. Les conséquences directes des violences dans ces derniers mois, ces dernières semaines, nous avions vu des cas de trauma chirurgical admis dans différentes structures. Je crois au total, les équipes de Médecin Sans Frontière ont pris en charge sur le plan chirurgical près de 400 cas dans les différentes structures, que ça soit à Bangui ou à l’intérieur du pays,  dans les endroits comme Bossangoa, Bangassou, Bria et autres. Et bien évidemment, on a aussi vu les différentes barrières à l’accès aux soins qui se sont accentuées face à la résurgence des violences dues à la réapparition des barrières physiques de sécurité.

OBM- Quelles sont les actions concrètes que votre organisation, les Médecins Sans Frontières, a eu à faire durant ces temps forts des violences, en matière de la prise en charge sanitaire bien sûr ?

E.L- Je crois que c’est l’occasion ici de citer trois actions principales :

La première action, c’est la continuité des soins dans la ville de Bangui. Nous avons essayé de renforcer et aussi contribuer à un plan de continuité des soins et donc le service des ambulances 24/24 et 7 jour/7, cela a été maintenu, cela a été renforcé et c’est très important.

La deuxième action a été le renfort de plan de contingences en cas des afflux des blessés ou tous ce qui est triage pour les blessés non seulement au niveau de l’hôpital communautaire ici à Bangui ; mais aussi dans les structures que nous supportons déjà, également dans des hôpitaux où MSF n’apporte pas d’emblée un support, on peut citer : Boali, Boyali et d’autres endroits.

La troisième action, c’est la prise en charge des conséquences directes des violences, et bien évidemment, il y’a aussi l’accompagnement vers la santé mentale non seulement pour les cas trauma, mais aussi pour les mamans qui doivent accoucher dans un contexte de violence.

OBM- Dites-nous comment MSF fait pour assister les personnes vulnérables sur les sites des déplacés et dans les familles d’accueils ?

E.L- Avec la recrudescence des violences, on a vu une augmentation des nouvelles poches des déplacés et cela s’ajoute à toujours tout près de 500.000 Centrafricains qui se retrouvent en dehors des frontières du territoire. Tout en rappelant cela et en mettant en avant par exemple plus de 10.000 Centrafricains qui ont dû chercher refuge de l’autre côté de la rivière de Mbomou de Bangassou à Ndu ou de rappeler des hommes, des femmes et enfants qui ont dû chercher refuge dans les sites notamment à Bouar, le MSF passe par une évaluation rapide et essaie dans un premier temps de répondre aux besoins essentiels. C’est l’accès aux soins ; c’est la santé mentale vu les traumas psychologiques, c’est l’accès à l’eau et c’est un support aussi en prévention de la malnutrition.

OBM- Est-ce qu’il a été facile pour vous d’accéder aux personnes ayant besoin d’assistance durant ces moments de violence ?

E.L- Nos très fortes préoccupations ayant été ici dans le pays entre 2014 et 2017, nous voyons une tendance, nous voyons un rétrécissement de l’espace dit Humanitaire, dans quelle mesure le Centrafricain sur l’étendue du territoire, derrière les lignes de front ont droit à l’accès aux soins.

Ça été les dernières semaines, les derniers mois un combat afin d’évoquer le respect pour les patients, les accompagnants, le personnel de santé et les structures de santé. Donc, il y’a lieu ici de rappeler au respect de l’ensemble des parties prenantes aux droits des patients et aux droits humains. Ce sont des exemples qui amènent à exprimer des fortes préoccupations et lancer un appel au respect et aussi le droit de dénoncer quand il y’a des violations graves.

OBM- Combien de projets MSF met en œuvre actuellement en Centrafrique et pour quelle importance ?

E.L- Depuis 1997 et actuellement, il y’a des projets avec une planification sur plusieurs années qui sont au nombre de 14 dont une qui est un projet uniquement dédié à la réponse rapide aux urgences ponctuelles et donc, cet outil a été utilisé notamment dans le cadre de la réponse en lien aux urgences suite à cette recrudescence des violences. Il y’a également le support dans le cadre du programme de la lutte contre le VIH SIDA, la tuberculose notamment à l’hôpital Communautaire, il y’a la contribution à la réduction de la mortalité maternelle néonatale infantile, à travers le centre de santé Urbain des Castors et nous espérons œuvrer très bientôt au niveau de l’hôpital Communautaire. Il y a le projet Tongolo qui essaie de répondre aux besoins d’une façon holistique des victimes des violences sexuelles.

OBM- Quels sont les perspectives de votre organisation ici en Centrafrique ?

E.L– Il faut le dire, c’est très malheureux la proportionnalité des besoins essentiels notamment en lien avec l’accès aux soins est très accrue encore sur l’ensemble du territoire. Face à cette proportionnalité des besoins, le MSF continue à assurer un support, ce qui veut dire un investissement très considérable. Il faut savoir que c’est sur toute l’étendue du territoire que le MSF investit le plus pour soigner les personnes les plus vulnérables

Nous vous remercions.

Christelle ADRISSE