Le Programme d’Appui à la Réforme du Secteur de la Sécurité et à la Gouvernance, financé par le 11ème Fonds Européen de Développement (FED) et mis en œuvre par CIVIPOL, a lancé les activités de sensibilisation et de communication dans le cadre de l’Action Pilote – Projet Européen d’Appui à la Modernisation de l’État Civil.

C’est du 8 au 10 décembre 2022 dans trois écoles de la zone du projet notamment dans les Communes de Bangui, Bégoua et Bimbo que le Ministère de l’Administration du Territoire, de la Décentralisation et du Développement Local, a organisée les premières activités de la campagne de sensibilisation et de communication sur l’importance de l’enregistrement et de la délivrance des actes de naissance.

La coopération Union Européenne / République Centrafricaine, a voulu mettre à profit la célébration de la Journée Internationale des Droits de l’Homme du 10 décembre pour lancer cette campagne. Des milliers d’élèves, parents, instituteurs, agents de l’État ont pris part à ces manifestations publiques.

Le gouvernement de la République Centrafricaine est déterminé à accroitre l’accès à l’état civil dans un pays où le taux d’enregistrement et de délivrance des actes reste très faible. Cependant, il demeure confronté à des difficultés organisationnelles et de contraintes de moyens. L’appui de l’Union Européenne à travers l’expertise de CIVIPOL lui permettra de faire face à ces défis.

Un enfant qui dispose d’un acte de naissance pourra jouir de ses droits civiques. Il s’agit d’un droit fondamental, clé pour une citoyenneté responsable et une évolution normale dans la vie. Élève, enseignants, parents et experts se sont livrés à l’Oubangui Médias pour donner leurs avis lors de ces trois jours de campagne de sensibilisation.

Ebiboda Gerville : « Aujourd’hui on nous a fait comprendre l’importance de l’acte de naissance »

Ebiboda Gerville est un élève en classe de CM2 à l’école primaire préfectorale de Bimbo dans l’Ombella Mpoko : « Aujourd’hui, les experts et journalistes nous ont fait comprendre l’importance de l’acte de naissance dans la vie d’un citoyen. Si tu as un acte de naissance, tu peux accéder à tout. C’est une très bonne chose d’avoir un acte de naissance car avec un acte de naissance, tu deviens une personne importante dans la société. Celui qui n’a pas un acte de naissance est une personne sans identité, qui n’existe pas. Nous disons aux parents, que tout ne peut se faire dans le pays qu’à base d’un acte de naissance. Ils doivent déclarer la naissance de chaque enfant, c’est la base de tout ».

Mme Marie Laure Biango Idama : « Tout ce que nous faisons dans la vie c’est avec un acte de naissance »

Mme Marie Laure Biango Idama est la Directrice de l’école du camp des Castors fille : « L’enregistrement de l’enfant à l’État-Civil est un parchemin important puisque tout ce que nous faisons dans la vie c’est avec un acte de naissance. Avec ce document, on peut avoir par exemple accès à toutes les pièces administratives et juridiques entre autres le certificat élémentaire fondamental 1 (CF1), le Brevet des Collèges (BEC), la carte nationale identité, le passeport, le permis de conduire… Donc si les parents qui viennent vers nous pour inscrire leurs enfants, et que ces enfants n’ont pas de l’acte de naissance, nous les orientons vers les services concernés afin qu’on puisse leurs établir un acte de naissance. C’est une question de Droits de l’Homme ».

Lebilo Fred Junior : « L’acte de naissance est une question de dignité et de liberté »

Fred Junior est un instituteur à l’école primaire préfectorale de la Commune de Bimbo : « Cette initiative vise à sensibiliser les parents sur l’importance d’enregistrer leurs enfants à l’État-Civil afin d’avoir un acte de naissance. Je ne vais pas accuser les parents mais je leur demande d’être responsables et de mener les démarches nécessaires pour obtenir ce document important pour leurs enfants afin de les inscrire à l’école. Vous savez, il est une question de dignité et de liberté de l’enfant jusqu’à l’âge adulte parce que c’est un document fondamental et juridique ».

Wassa Yvette : « Même à l’hôpital souvent on demande l’âge de l’enfant pour lui donner les médicaments »

Wassa Yvette est parent-d’élève dans la commune de Bégoua : « Cette campagne de sensibilisation nous a beaucoup éveillé la conscience. Même à l’hôpital, lors de la consultation, le médecin demande « l’enfant a quel âge ? ».  Il faudrait que tu sois en mesure de donner la date et l’année de naissance de l’enfant. Car tu devrais avoir ça en tête. Pour cela, l’enfant doit avoir un acte de naissance. Cela permettrait au médecin de

prescrire des médicaments selon l’âge de l’enfant. Si ce n’était pas le cas, ça serait très dangereux pour la santé de l’enfant qui ne va pas recevoir des soins appropriés. Donc, nous les parents, nous devons en parler tout autour de nous sans complexe et sensibiliser les autres afin de motiver plus de personnes à faire enregistrer leurs enfants à l’État-Civil dès la naissance puisque maintenant c’est gratuit. Même les femmes qui accouchent hors services de santé doivent suivre les procédures depuis le chef de quartier. Il pourra délivrer un document attestant la naissance d’un enfant dans son quartier pour enfin se rendre dans un centre d’état-civil afin d’avoir accès à un acte de naissance ».

Al Hadji Abacar Dieudonné Nyakanda : « La modernisation de l’État-Civil est une préoccupation de l’État Centrafricain »

Al Hadji Abacar Dieudonné Nyakanda est un Expert en Administration et travaille à CIVIPOL : « L’engagement du Gouvernement centrafricain sur le renouvellement du contrat social entre l’État et la population contenu dans le Plan de Relèvement et de la Consolidation de la Paix (RCPCA), comprend aussi le volet de d’appui à l’état-civil. Cela précède déjà de l’engagement inscrit dans la Constitution du 30 mars 2016, qui réaffirme l’adhésion de Centrafrique à la ratification des Droits Civils et Politiques, laquelle mentionne que tout enfant à le droit d’être enregistré dès sa naissance. C’est ainsi qu’après une enquête réalisée dans plusieurs localités, il y a beaucoup d’enfants qui n’ont pas d’acte de naissance presque la moitié dans les établissements scolaires. D’où la nécessité de sensibiliser et communiquer sur l’importance de l’enregistrement et de la délivrance de l’acte de naissance. L’enregistrement de l’enfant à l’état-civil est d’ailleurs un acte juridique fondamental par lequel tout citoyen acquiert une identité juridique qui légitimera par la suite ses droits et ses devoirs en tant que membre à part entière d’une Nation ».

Rappelons qu’un Décret de la Présidente de la Transition, Catherine SAMBA PANZA, avait instauré la gratuité de la délivrance des actes de naissance et des jugements supplétifs pour les enfants nés entre le 1er décembre 2012 et le 31 décembre 2014 (Décret du 10 juillet 2014 portant gratuité des services d’établissement des actes de naissance des enfants nés en période de conflit). Cette décision exceptionnelle, concernant une période de troubles, a été motivée par la crise politico-sécuritaire et le fait que beaucoup de mairies ne fonctionnaient plus durant cette période de violence.

La démarche de sensibilisation et de communication dans les écoles et auprès des parents d’élèves est motivée par le résultat inquiétant d’une enquête réalisée par CIVIPOL dans les écoles. En effet sur 428 établissements scolaires visitées de la Préfecture de Bangui, plus de 109 600 enfants n’avaient pas d’acte de naissance ce qui, avec un taux de fratrie à 2,5 laisse à penser qu’au moins 274 000 en sont dépourvus.

Zarambaud Mamadou