Le dialogue est rompu entre une partie de l’opposition et le gouvernement depuis près d’une année. La situation politique s’est crispée avec le projet des réformes constitutionnelles alors que la Centrafrique entre dans une phase décisive d’organisation des élections municipales. Un dialogue sera-t-il encore possible entre ce groupe d’opposition et le pouvoir ?

Le dialogue, bien qu’essentiel n’est pas exclu. Mais, il n’est pas sûr. Pas sûr vu le contexte du pays marqué par la précarité économique et les tensions de trésorerie. Il n’est pas sûr parce que le gouvernement et les partenaires sont très avancés dans les préparatifs des élections locales, qui vont être organisées 35 ans après les dernières tenues en 1988.

Les élections locales sont synonymes de la démocratie à la base, le vrai pouvoir du peuple, par le peuple. Dans ce pays où la voix du peuple est difficilement prise en compte par les instances de prise des décisions, cette occasion est à saisir par tous ceux qui soutiennent le principe et la pratique de la démocratie.

En effet, en mars 2022, le gouvernement avait organisé le dialogue républicain avec toutes les forces vives de la Nation. Une partie de l’opposition réunie aujourd’hui au sein du Bloc des Républicains pour la Défense de la Constitution (BRDC) avait boycotté cette grande rencontre, réclamant la présence des leaders des groupes armés, principalement de l’ancien président François Bozizé qui avait pris la tête de la rébellion de la Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) avant de tenter sans succès de faire tomber le président Faustin Archange Touadera.

Cette occasion avait permis aux participants de s’opposer à un quelconque dialogue avec les groupes armés, qui avaient d’ailleurs signé le 6 février 2019 un accord pour la paix et la réconciliation avec le gouvernement avant de rejoindre la CPC en 2020. La population n’a pas vu la sincérité des engagements pris par les rebelles dans cet accord même si quelques-uns sont restés fidèles à cet accord.

Un possible dialogue de trop ?

Un nouveau dialogue est jugé de trop pour les uns mais essentiel pour les autres. Le choix sera difficile pour le président Faustin Archange Touadera qui semble retirer les mains tendues. Mais sans une concertation, les élections locales risquent d’être un rendez-vous d’éternelle contestation et de tension politique voire sécuritaire.

Le dialogue ou la concertation devrait être permanent pour un pays comme la Centrafrique, afin de maintenir un climat apaisé et marqué les pas vers le développement.

L’opposition semble être aujourd’hui divisée. Cela profite au gouvernement. Une partie des leaders d’opposition qui avaient pris part au dialogue républicain réitèrent leurs participations aux prochaines élections locales. Toutefois, celle réunie au sein de la BRDC pose des conditions notamment le dialogue inclusif avant leur participation au processus électoral.

L’opposition doit tirer les leçons du passé !

En 2020, alors que la pandémie du COVID-19 affectait le monde et la Centrafrique, le gouvernement avait demandé à la Cour Constitutionnelle de prolonger de six mois le mandat du président de la République et le mandat du parlement. L’opposition s’est opposée à ce projet et la Cour Constitutionnelle a rejeté la requête du gouvernement.

Vers la fin de l’année, alors que la situation sécuritaire se dégradait, c’est le tour de l’opposition de demander le report des élections. Pour éviter de tomber dans un vide constitutionnel à la fin du mandat du président Touadera, la Cour Constitutionnelle confirme la tenue des élections. Le pouvoir a gagné le terrain et s’est préparé à la réélection du président Faustin Archange Touadera. Alors, l’opposition entre précipitamment dans le processus et par manque d’une réelle préparation perd les élections. Elle conteste la réélection de Touadera.

Puisque les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets, le processus électoral actuel risque de connaitre le même scénario. Alors que le BRDC s’oppose à la tenue de ces élections, le parti au pouvoir et ses alliés gagnent progressivement le terrain. Les candidats indépendants préparent le terrain. La communauté internationale se mobilise pour financer les élections. La Minusca et le gouvernement valident le plan de sécurisation des élections. Le processus avance lentement quand bien-même difficile.

Ce qui est sûr, il n’y a jamais un dialogue de trop pour rechercher la paix définitive dans un pays. C’est le cas de la Centrafrique qui cherche depuis plusieurs décennies le véritable chemin de la paix, de la stabilité et du développement.

Fridolin Ngoulou