La commune de Boukoko située au sud de la République Centrafricaine dans la préfecture de Lobaye (15 Km de Mbaïki) était un centre expérimental polyvalent agronomique de la sous-région. Ce centre a été créé en 1939. Le choix n’est pas au hasard pour le Comité International de Croix-Rouge (CICR) d’apporter aujourd’hui un soutien multiforme entre autres : des matériels agricoles, engrais et semences… aux groupements Agri-Multiplicateurs de semences végétales (GAM) de la localité qui disposent d’une superficie de plus 1500 hectares de terres accordées par l’Institut Centrafricain des Recherches Agronomiques (ICRA). En mission de reportage dans cette zone, Oubangui Médias a pu échanger avec le promoteur du projet, l’Assistant agronome chez CICR, Eléonor Kongbo Dembo qui nous explique la portée de ce programme de sécurité alimentaire.

Oubangui Médias : Monsieur Eléonor Kongbo Dembo, bonjour. Le CICR est présent dans la préfecture de la Lobaye et précisément à Boukoko pour apporter son appui aux groupements agricoles. Depuis quand et pourquoi le choix de la localité de Boukoko pour la production des semences?

Eléonor Kongbo Dembo : Bonjour. Le CICR a commencé à travailler dans la zone depuis un bon moment, mais avec le projet en cours, c’est à dire le projet de la multiplication des semences, nous avons démarré depuis 2019. Nous nous sommes rendus compte qu’avoir des semences de qualité pose problème en Centrafrique alors que le climat est très favorable. Voilà pourquoi en 2019, nous avons initié le projet d’appui aux groupements. Ils ont commencé à avoir des intrants, des matériels agricoles pour pouvoir produire les bonnes qualités de semences.

Si nous parlons de semences ici, au niveau de CICR,  vue que la qualité n’existe pas en Centrafrique, nous sommes obligés de pouvoir importer les semences de base depuis le Cameroun au niveau de l’IRAD pour mettre à la disposition des groupements. Nous avions commencé avec l’arachide puis le maïs. Cette année, nous avons ajouté le niébé et le sorgho dans la localité de Birao. Mais à Boukoko, c’est l’arachide, le maïs et le niébé. Il sera donc très bénéfique de produire localement les semences.

En effet, le projet est établi pour prendre fin en 2025. A la fin de chaque campagne, nous évaluons la qualité des semences. Nous avions démarré ce projet avec 40 groupements Agri-Multiplicateurs. D’ici 2025, les groupements doivent être en mesure de produire pour pouvoir satisfaire les besoins en semence de bonne qualité à tous nos bénéficiaires. Après 2025, le CICR pourra continuer à acheter les semences produites par ces groupements pour redistribuer aux ménages dans le besoin.

Oubangui Médias : Quels sont les bénéficiaires directes de votre projet?

Eléonor Kongbo Dembo : Les populations directes bénéficiaires sont les membres des groupements Agri-Multiplicateurs. Mais, après tout ce qui va être produit dans le cadre du projet, permettra au CICR de distribuer aux ménages vulnérables dans les zones prioritaires.

Il est important de noter que c’est un projet qui se met en œuvre en partenariat avec les structures étatiques. La loi semencière prévoit que, s’il est question de produire des semences, il faut la présence des structures étatiques notamment l’ICRA pour tout ce qui est de renforcements de capacités, l’ONASEM qui doit jouer un rôle d’arbitre de certification de semences et aussi l’ACDA qui accompagne les producteurs à pouvoir respecter tout ce qui est itinéraire technique de différentes cultures en vue d’avoir une production plus élevée.

Oubangui Médias : La multiplication des semences est juste basée dans la Lobaye ou elle se fait aussi dans d’autres régions ?

Eléonor Kongbo Dembo : C’est un projet que nous sommes est en train de dupliquer dans plusieurs zones. En 2019, nous avons commencé ce projet dans deux zones : Boukoko et Bouar dans la Nana-Mambéré. Mais chaque année, nous essayons de réaliser ce projet dans d’autres zones, notamment à Bambari, à Birao à Kaga-Bandoro, à Dekoa et dans la Kémo.

Oubangui Médias : Après la production quels sont les actions qui accompagnent cette initiative ?

Eléonor Kongbo Dembo : Après la production chaque année, nous distribuons des semences de bonnes qualités aux ménages vulnérables, à la fin de la récolte, donc après la certification par l’ONASEM. Le CICR viendra acheter les semences pour pouvoir distribuer au cours de la prochaine campagne agricole aux différents ménages vulnérables dans les différentes zones prioritaires d’intervention de CICR.

Oubangui Médias : Depuis le démarrage de ce projet, quel est réellement son impact sur la population ?

Eléonor Kongbo Dembo : Je vais donner un exemple pour cette année, nous avons réalisé une activité à Gamboula, c’est dans la sous délégation de Bouar, à Kaga-Bandoro, nous sommes en train de distribuer dans le triangle Batangafo, Ouandago. Nous avons au moins 4000 ménages qui ont reçu cette semence et dans la localité de Bambari, nous distribuons aussi à Grimari. Chaque année, nous distribuons les semences en fonction des zones prioritaires définies par CICR. Et nous contribuons énormément à la sécurité alimentaire de plusieurs milliers de personnes.

En fait, le CICR souhaite avoir une quantité suffisante de semences pour pouvoir satisfaire le besoin des bénéficiaires. Pour l’instant, chaque groupement dispose d’une superficie importante  pour produire et selon les estimations au moins 1 tonne et demi, autrement dit 1500 KG par hectare.

Oubangui Médias : La plus part des bénéficiaires cultivent à la main, est ce que le CICR pense au moins à aider ces agriculteurs à mécaniser la culture des semences?

Eléonor Kongbo Dembo : Le CICR travail toujours dans un contexte de conflit armé ou de catastrophes naturelles. Pour l’instant, le CICR n’a pas pensé à mécaniser l’agriculture. Nous intervenons dans l’urgence humanitaire et le développement. Dès la première année du projet, nous avions loué les tracteurs pour labourer les superficies des terres. Et chaque année, le CICR alloue un petit appui pour que les producteurs s’occupent des besoins nécessaires et produire.

Oubangui Médias : Eléonor Kongbo Dembo, nous vous remercions

Eléonor Kongbo Dembo : C’est à moi de vous remercier.

Interview réalisée par Zarambaud Mamadou