La Sucrerie Centrafricaine (SUCAF), une société du groupe français Castel avait annoncé la semaine dernière le processus de sa liquidation. Les questions d’exonération font partie des raisons qui ont chuté cette société française en Centrafrique.

La SUCAF RCA est une société anonyme de droit centrafricain, située à Bangui, au capital de 6.243.460.000 francs CFA (soit 21.723.985 Euros). Elle est spécialisée dans la production et commercialisation du sucre en Centrafrique.

La SUCAF RCA a été créée en 2003, suite à la privatisation de la Société de Gestion des Sucreries Centrafricaines (SOGESCA), pour une valeur de 2,2 milliards de FCFA, soit 3,3 millions d’euros. La SOGESCA a été fondée en 1987 par l’Etat Centrafricain. Pendant ce temps, elle produisait au moins 6000 tonnes de sucre par an et employait 300 personnes.

Depuis 2020, le gouvernement n’a pas renouvelé l’exonération dont elle bénéficie depuis 15 ans. En effet, en  2005, la SUCAF-RCA a obtenu une exonération total des impôts et taxes pour une période de 10 ans avec un monopole total sur le sucre pour la RCA. A cette période, la société produisait autours de 14 milles tonnes du sucre pour une demande qui avoisinait les 24 milles tonnes. Donc, elle doit exporter 10 milles tonnes totalement exonérés des taxes pour compenser le déficit.

En contrepartie de l’apport de l’Etat, la SUCAF-RCA devrait investir pour augmenter les superficies plantées en vue de répondre à la demande locale.  En 2015, cette société a pu obtenir à nouveau la même exonération pour 5 ans. Après l’expiration, la SUCAF-RCA introduit à nouveau une demande d’exonération pour une période de 10 ans, c’est-à-dire, de 2020 à 2030.

Malgré les 15 ans d’exonération, la production de la SUCAF-RCA a au contraire baissé à moins de 8 milles tonnes de sucre alors que la demande a augmenté à 45 milles tonnes par année, vu l’augmentation de la taille de la population. La SUCAF-RCA évoque les raisons liées à la crise sécuritaire dans le pays, touchant ses installations dans le pays ainsi que la concurrence déloyale des autres acteurs économiques.

Des sources proches du ministère des finances ont confié à Oubangui Médias que pendant toutes ces années d’exonération, l’Etat a perdu des centaines de milliards de FCFA et la SUCAF-RCA n’a pas pu augmenter la superficie de ses productions. L’importation du sucre a été plus supérieure que la production locale. Plusieurs milliards de FCFA ont été alors investis à l’extérieur. Ceci est un manque à gagner pour l’Etat Centrafricain qui manque des ressources pour son fonctionnement.

Une faille sur fond d’accusation de complicité au crime de guerre

Faisant partie du groupe Castel en difficulté en Centrafrique pour avoir été accusé de soutenir les rebelles de l’UPC en échange de protection de ses installations, la filiale Sucrerie Centrafricaine (SUCAF) a entamé une phase de liquidation. Une douche froide pour plus de 1.200 employés.

Le vrai déclin a commencé suite à la publication le 18 août 2021, du rapport de l’ONG américaine The Sentry, qui révèle que la Sucrerie Centrafrique, a conclu « un accord tacite » de sécurité avec l’Unité pour la Paix en Centrafrique (UPC), un groupe armé bien connu pour sa brutalité dirigé par le mercenaire nigérien Ali Darass.

Selon le rapport, l’objectif apparent de cet arrangement visait à faciliter la protection de l’usine et des champs de canne à sucre de la SUCAF RCA, mais aussi d’assurer la libre circulation des transporteurs sur les axes routiers clés et d’aider à assurer le monopole de la société sur la distribution du sucre dans plusieurs préfectures sous contrôle rebelle. En contrepartie du soutien de l’UPC, la SUCAF-RCA a financé cette milice violente par le biais de paiements directs et indirects en espèces, ainsi que par un soutien en nature sous forme de réparations de véhicules et d’approvisionnement en carburant.

Une année plus tard, l’étau s’est resserré autour du géant français de la boisson Castel au sein duquel groupe se trouve la SUCAF RCA. Une enquête préliminaire a été ouverte le mercredi 29 juin à Paris contre le groupe accusé depuis l’an dernier de complicité de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en RCA. Castel disait prendre acte et est pleinement disposé à coopérer avec la justice.

Pour le moment, il n’est pas exclu que l’Etat centrafricain reprenne la gestion de cette société qu’il a cédé au groupe français en 2003.

Fridolin Ngoulou