Les relations France -Centrafrique sont restées tendues depuis 2020. Alors que la France a annoncé le retrait définitif de ses militaires de la Centrafrique d’ici la fin de l’année 2022, le dialogue entre ces deux pays est-il encore possible pour apaiser les tensions ?

Officiellement, on donne l’impression que tout va bien, la France et la Centrafrique entretiennent une bonne relation. Mais dans les faits, c’est une diplomatie de guerre, de coup bas, de méfiance et de divorce. Le divorce est le terme approprié qui caractérise les relations entre la France et la Centrafrique, son ancienne colonie longtemps considérée comme pré-carré.

Au centre de ce divorce, l’arrivée de la Russie, une puissance rivale à la France qui est dans une posture de la diplomatie offensive en Afrique. Ce nouveau partenaire de la Centrafrique et bien d’autres pays francophones a profité d’une main tendue, facilitée par la France pour occuper une position privilégiée et stratégique.

Le divorce consommé ?

Nul de doute que l’arrivée de la Russie-du moins sa nouvelle stratégie car elle est en Centrafrique depuis les années 1960- a tout bouleversé. Sachant jouer sur le besoin premier des Centrafricains, notamment la Sécurité, les forces russes, aussi appelées instructeurs russes, alliées, mercenaires Wagner…ont su en quelques temps former et accompagner les Forces Armées Centrafricaines (FACA) sur les théâtres de combat pour aboutir à la restauration significative de la sécurité dans plusieurs villes. Là où les autres ont « échoué », les FACA sont arrivées à déloger plusieurs groupes rebelles du pays.

Les relations tendues entre la France et la Centrafrique viennent de la présence russe, qui aussitôt arrivée s’est intéressée aux mines centrafricaines. La France qui ne pouvant supporter cette « humiliation » déclare la fin de ses appuis budgétaires à la Centrafrique. Les autres institutions bancaires et partenaires comme le Fonds Monétaire International, la Banque mondiale et l’Union Européenne ont emboité les pas à la France pour priver l’Etat Centrafricains des ressources importantes de son budget. Depuis 2020, les aides budgétaires de 2019 sont gelées et plus d’appuis dans la caisse de l’Etat Centrafricain, sauf les financements des projets.

Le divorce semble être consommé. Surtout que ces deux pays à un moment donné sont rentrés dans une guerre de communication, voire de dénigrement, les attaques verbales, les désinformations, les théories de complot qui viennent noircir le peu qui reste comme relation diplomatique entre ces deux pays.

Le principe du décanat, faisant toujours des ambassadeurs français même s’il vient d’arriver le « doyen du corps diplomatique » a été retiré. C’est l’ambassadeur du Maroc qui porte ce titre privilégié et devient comme le porte-parole des ambassadeurs accrédités en Centrafrique.

Des entreprises françaises sont en difficulté en Centrafrique. Bolloré s’est vu retirer le port de Bangui au profit d’une société chinoise Mercure, la Sucrerie Centrafricaine (SUCAF) a décidé de liquider sa société, Total en grande difficulté d’approvisionnement de Carburant, le groupe Castel aussi en grande difficulté devant la justice française pour avoir soutenu les rebelles pendant les crises. Seules quelques entreprises françaises comme Orange Centrafrique, Air France tiennent encore le coup face à ce mauvais vent qui souffle sur la diplomatie dans ce pays. En fait, la France ne détient pas des grandes firmes dans le pays.

Tout ce tableau teinté de mauvais nuage fait passer ces pays dans une zone de turbulence. Comme cela peut arriver dans la vie de deux pays, ce qui est sûr, les divorcés peuvent aplanir leurs divergences et renouer avec les bonnes relations même si le nouveau partenaire n’a pas vocation à déguerpir maintenant.

Les divorcés peuvent-ils dialoguer à nouveau ?

D’emblée, le dialogue politique et sincère est encore possible. Une condition primordiale est le respect de la souveraineté de la Centrafrique. Petite qu’elle soit, pauvre qu’elle soit, un pays reste un pays, surtout qu’il est reconnu et fait partie des pays membres de l’Organisation des Nations-unies. C’est la base à tout dialogue politique entre ces deux pays.

Aujourd’hui, la Centrafrique demande un minimum de respect de sa souveraineté. De l’autre côté, la France tient à son honneur et déteste les désinformations et toute autre forme de propagande. Elle tient aussi au respect des libertés fondamentales, en bref du respect des droits de l’homme.

Nous pensons qu’au-delà de ce combat géopolitique et géostratégique entre la France et la Russie sur le sol Centrafricain, pour l’intérêt des deux peuples, la France et la Centrafrique doivent s’inviter aux tables pour discuter en toute sincérité. Juste dans l’objectif de maintenir une bonne ambiance entre le bas peuple qui parfois ne maitrise rien des guéguerres entre les politiques.

Le peuple Centrafricain, épris de paix et soucieux de voir son pays décoller sur le plan économique voudrait un partenaire qui puisse l’aider à réaliser ses rêves que ceux qui veulent le maintenir dans la pauvreté, l’exploiter et le laisser à la merci des bandes armés criminelles qui n’ont autre objectif que piller les richesses de ce pays.

Alors que l’Armée française va dire byebye à la Centrafrique pour la énième fois, alors que la nouvelle résolution de l’ONU pour la Centrafrique ne prévoie plus rien comme intervention de l’armée françaises en cas de menace de grande envergure, alors que la Russie s’enracine et décline aussi ses inventions dans le domaine économique et minier, la Centrafrique et la France doivent aplanir leurs différents juste pour garder les relations car personne de connait l’avenir.                          

Fridolin Ngoulou