Le bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) a rendu public le 4 janvier dernier l’aperçu des besoins humanitaires en 2024. Les besoins sont en baisse et attribués à l’amélioration des conditions sécuritaires dans le pays, comme l’a dit Tobias Schuldt, Chef de bureau adjoint d’OCHA dans une interview avec l’Oubangui Médias.

Oubangui Médias : Monsieur le Chef de Bureau Adjoint Bonjour. La coordination humanitaire a publié l’aperçu des besoins humanitaires et note que les besoins ont sensiblement baissé. Qu’est ce qui justifie cette baisse ?

Tobias Schuldt : Merci beaucoup pour cette occasion. Je pense qu’il est important de souligner que ces quatre années consécutives, nous faisons la même évaluation. C’est une façon objective de voir les tendances dans le pays.

La réduction des besoins humanitaires en RCA est en grande partie attribuée à l’amélioration des conditions de sécurité dans certaines régions. Le nombre des chocs auxquels la population fait face comme les affrontements entre les parties aux conflits a baissé. En 2023, les chocs ont baissé par 26% par rapport aux chocs en 2022 ainsi que les mouvements de population.

Aussi, il faut souligner qu’il y a l’efficacité de la réponse humanitaire et la résilience communautaire a joué un rôle important. Les communautés locales sont devenues plus capables de faire face aux chocs là où il y a eu des interventions humanitaires. Malgré tout cela, les besoins sont là. Les secteurs avec les plus grands nombre de besoins en 2024 seront l’eau, l’hygiène et assainissement, la sécurité alimentaire, la santé et la protection. L’accès limité aux services de base constitue aussi le centre d’intérêt. Au moins 2,8 millions de personnes soit 46% de la population seront extrêmement vulnérables en 2024, on croit que seule l’assistance humanitaire ne suffit pas pour leur bien-être.

Oubangui Médias : Selon vous, cette baisse vaut-elle changement d’objectif humanitaire dans le pays ?

Tobias Schuldt : Pas vraiment. Je pense que l’action humanitaire reste l’action humanitaire. Cela veut dire que nous mobilisons les ressources pour rester là où il y a les chocs. Il y a trois zones où nous avons vu, malgré l’amélioration globale de la situation, une détérioration des conditions comme la zone de la Vakaga, du Haut-Mbomou et de Lim-Pendé où la situation est devenue très grave.

Cela veut dire que nous allons nous recentrer sur les zones où les besoins restent pressent et se retirer dans les zones où aujourd’hui les réponses humanitaires ne sont plus appropriées ou urgentes.

Oubangui Médias : Est-ce le moment de parler réellement de Nexus humanitaire ?

Tobias Schuldt : Le Nexus c’est l’approche de plusieurs parties, c’est-à-dire les acteurs de développement, de paix ainsi que les humanitaires. Nous cherchons toujours à travailler la main dans la main pour avoir de l’impact maximum pour la population afin de passer de l’aide humanitaire d’urgence à l’aide au développement pour garantir la stabilité à long terme. Tout ça, c’est rompre le cycle de dépendance à l’assistance d’urgence. Lorsque les programmes d’aide s’achèveront, plus d’acteur doit apporter une aide pour éviter que la population ne tombe pas dans le cycle de dépendance.

Là, nous souhaitons nous retirer dans certaines zones parce que les conditions se sont améliorées pour que les acteurs de développement prennent la relève pour contribuer au développement dans ces zones.

Oubangui Médias : Est-ce le retrait des humanitaires dans certaines zones va garantir la durabilité de la tendance en baisse de besoin humanitaire ?

Tobias Schuldt : Notre focus comme acteur humanitaire reste toujours à répondre aux personnes qui font face aux problèmes humanitaires et de les aider de sortir  de la situation à laquelle elles vivent.

Oubangui Médias : Quels sont encore les défis que les humanitaires rencontrent dans le pays ?

Tobias Schuldt : Malheureusement, il y a toujours beaucoup de défis. Nous faisons face aux effets du changement climatique. Nous avons vu des inondations en 2023, les conflits se poursuivent dans certaines zones et également l’aspect de droit international humanitaire et un très grand défi pour les humanitaires c’est l’accès. Le nom accès est lié à l’insécurité. Pour acheminer l’assistance humanitaire, ici en RCA, c’est très couteux et de temps en temps presque impossible dû aux conditions des routes. Nous ne devons pas oublier que l’année 2023, il y a 169 incidents qui ont affecté les humanitaires avec un humanitaire tué et quatre blessés alors que tous fournissaient de l’assistance à la population en détresse.

Oubangui Médias : Sur la question des inondations en 2023, nous avons constaté que l’assistance a été très faible. Qu’est ce qui justifie cela ?

Tobias Schuldt : Il y a une chose à considérer. Le financement mobilisé en 2023 était à 50% par rapport à 2022 où nous étions à environ 90%. Dans le monde aujourd’hui, il y a malheureusement de plus en plus de crises, la situation économique des bailleurs se complique aussi. En conséquence, il y a moins de financement disponible. Cela veut dire qu’il y a un problème de moyen pour répondre aux populations en détresse. Nous avons néanmoins parlé avec d’autres acteurs notamment ceux du développement afin d’investir dans les zones qui sont inondables chaque année. Il faut un travail de prévention pour réduire les risques.

Oubangui Médias : Monsieur Tobias Schuldt, merci

Tobias Schuldt : C’est à moi de vous remercier.

Interview réalisée par Fridolin Ngoulou